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Budget fédéral 2018 : présentation de certaines mesures fiscales

28 février 2018

Le 27 février 2018, le ministre des Finances a déposé le budget fédéral canadien de 2018 (le « Budget 2018 »). Comme nous nous y attendions, le Budget 2018 présente des mesures touchant l’imposition du revenu de placement passif généré par des sociétés privées. Par contre, les changements ne sont pas aussi vastes que prévu. De plus, dans le Budget 2018, le ministère des Finances annonce diverses mesures, notamment des règles anti-évitement spécifiques, des mesures législatives tenant compte de la jurisprudence récente ainsi que d’autres changements visant des problèmes soulevés dans les dispositions actuelles de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR »).

Bien que le Budget 2018 ne contienne pas de propositions en réaction aux récentes réformes fiscales américaines, le ministère des Finances a indiqué qu’il entend effectuer une analyse détaillée de ces réformes afin de déterminer les répercussions qu’elles pourraient avoir sur le Canada.

De nombreux contribuables seront soulagés d’apprendre que le Budget 2018 ne prévoit pas non plus de hausse du taux d’inclusion des gains en capital ni de changement quant au traitement fiscal des options d’achat d’actions attribuées aux employés.

Mesures visant la fiscalité internationale
Changements apportés au régime des sociétés étrangères affiliées
Dépouillement de surplus transfrontalier
Période de nouvelle cotisation
Modifications relatives aux conventions fiscales
Mesures visant l’impôt des sociétés
Revenu de placement passif
Règles sur les fractions à risques pour les paliers de sociétés de personnes
Pertes artificielles obtenues au moyen d’arrangements financiers fondés sur des capitaux propres
Règle sur la minimisation des pertes dans les opérations de rachat d’actions
Autres modifications fiscales
Déclaration pour les fiducies
Financement des activités de mise en application de la loi et des tribunaux
Mesures relatives à la TPS/TVH à l’égard des sociétés en commandite de placement

MESURES VISANT LA FISCALITÉ INTERNATIONALE

Changements apportés au régime des sociétés étrangères affiliées

Le Budget 2018 contient des mesures relatives au régime canadien des sociétés étrangères affiliées (les « SEA »), y compris une réduction du délai pour produire la déclaration de renseignements T1134 et l’introduction de règles visant à limiter les avantages des « arrangements de référence ».

L’Avis de motion de voies et moyens (l’« AMVM ») qui accompagne le Budget 2018 ne prévoit pas de projet de loi portant sur les mesures du régime des SEA.

Le régime des SEA s’applique généralement aux avoirs des contribuables canadiens dans des sociétés étrangères. En général, une SEA désigne une société étrangère dans laquelle le contribuable détient au moins 10 % des actions d’une catégorie. Conformément au régime des SEA, le revenu du contribuable canadien comprend, selon la comptabilité d’exercice, tout « revenu étranger accumulé, tiré de biens » (le « REATB »), qui est généralement un revenu de placement passif, d’une société étrangère affiliée contrôlée (une « SEAC »). Une SEAC est habituellement une SEA dans laquelle le contribuable, seul ou de concert avec un nombre limité d’autres personnes, détient une participation majoritaire. De plus, le régime des SEA prévoit la déduction complète des dividendes qu’un contribuable canadien reçoit d’une SEA et qui proviennent des revenus d’une entreprise exploitée activement de cette SEA dans un pays avec lequel le Canada a conclu une convention fiscale ou un accord d’échange de renseignements fiscaux.

Exigences en matière de déclaration

Les contribuables canadiens qui détiennent des SEA sont tenus de produire des renseignements détaillés au moyen de la déclaration de renseignements T1134. À l’heure actuelle, ces déclarations de renseignements doivent être produites dans les 15 mois suivant la fin de l’année d’imposition applicable du contribuable. Le Budget 2018 propose d’exiger que ces déclarations de renseignements soient produites dans les six (6) mois suivant la fin de l’année d’imposition du contribuable, de façon à faire correspondre la date limite de production de ces déclarations avec la date limite de production de la déclaration de revenus canadienne pour les sociétés.

Cette mesure pourrait représenter un défi pour de nombreux contribuables, qui devront fournir les renseignements exigés dans un délai plus court. Afin d’accorder aux contribuables du temps pour s’adapter à ce changement, il est proposé dans le Budget 2018 d’appliquer ce changement aux années d’imposition qui commencent après 2019.

Arrangements de référence

Dans le Budget 2018, le gouvernement propose deux mesures pour remédier à ce qu’il juge être une utilisation inappropriée des « arrangements de référence ». Il s’agit généralement d’arrangements qui consistent à regrouper des actifs dans une SEA de façon à obtenir un traitement favorable en vertu du régime des SEA, le rendement tiré d’actifs précis étant toutefois attribué à des investisseurs en particulier de sorte que ceux-ci ne sont pas regroupés d’un point de vue économique.

Comme nous l’avons indiqué précédemment, un contribuable canadien est tenu d’inclure dans son revenu, selon la comptabilité d’exercice, tout REATB gagné par sa SEAC. Le REATB comprend le revenu provenant d’une « entreprise de placement », qui est généralement un revenu tiré d’une entreprise dont le but principal est de tirer un revenu de biens. Cependant, une « entreprise de placement » ne comprend pas une entreprise qui, entre autres, compte plus de cinq (5) employés à plein‑temps (le « critère des six employés »). Cette exception à la définition du terme entreprise de placement (l’« exception relative à l’entreprise de placement ») s’applique à chaque entreprise.

Dans le Budget 2018, le gouvernement indique que certains contribuables utilisent des arrangements pour regrouper les actifs de contribuables dans une seule SEA pour que cette dernière satisfasse au critère des six employés, alors que ce critère ne pourrait pas être respecté si chaque contribuable fournissait des actifs à une SEA distincte. Selon le gouvernement, dans le cadre de ces arrangements, chaque contribuable reçoit d’un point de vue économique le rendement sur les actifs qu’il a fournis à la SEA en fonction des modalités de sa quote-part ou de ses droits contractuels, lesquels prévoient que chaque contribuable reçoit un revenu distinct.

Le Budget 2018 propose également d’introduire une règle de sorte que, lorsque le revenu attribuable à des activités particulières exercées par une SEA s’accumule au bénéfice d’un contribuable en vertu d’un arrangement de référence, ces activités seront réputées constituer une entreprise distincte pour l’application du critère des six employés. Chaque entreprise distincte « réputée » devra donc satisfaire à chacune des conditions pertinentes de l’exception relative à l’entreprise de placement, y compris le critère des six employés, afin que le revenu de la SEA tiré de cette entreprise réputée puisse être exclu du REATB.

Par ailleurs, dans le Budget 2018, le gouvernement indique que des contribuables évitent de façon inappropriée d’être assujettis à l’imposition du REATB en regroupant des actifs devant générer un REATB dans une SEA afin d’éviter le statut de société étrangère affiliée contrôlée (c.-à-d., le groupe de contribuables est suffisamment important qu’ils adoptent la position qu’ils ne détiennent pas ou ne prennent pas part à une participation majoritaire dans la SEA). Toutefois, au lieu de toucher tout le rendement économique du portefeuille de la SEA, chaque contribuable reçoit le rendement d’un portefeuille de placements en particulier aux termes d’un arrangement de référence.

Dans le Budget 2018, il est alors proposé qu’une SEA d’un contribuable soit réputée être une SEAC du contribuable si le REATB attribuable aux activités de la SEA s’accumule au bénéfice du contribuable en vertu d’un arrangement de référence. Il reste à voir quelle sera la portée de la définition des arrangements de référence aux fins de ces mesures. Les contribuables qui investissent dans des sociétés distinctes ou des sociétés à compartiments multiples pourraient être touchés par ce changement.

Lorsque le projet de loi sera publié, il devra être examiné attentivement afin de s’assurer que des coentreprises commerciales de bonne foi ne se retrouvent pas visées par inadvertance par les règles sur les entreprises de placement et que les fonds d’investissement commerciaux étrangers qui sont structurés sous forme de sociétés ne soient pas réputés être, de façon inappropriée, des SEAC de contribuables canadiens.

Chacune de ces mesures visant les arrangements de référence s’appliquera aux années d’imposition d’une SEA qui commencent à compter du 27 février 2018.

Commerce de dettes

En 2014, le gouvernement a limité davantage l’accès à l’exception au titre de la définition d’entreprise de placement applicable aux SEA qui sont des institutions financières réglementées, en exigeant que le contribuable canadien respecte certains critères, notamment les exigences minimales en matière de capital. Une autre règle selon laquelle le revenu tiré de l’entreprise d’une SEA, lorsque l’objet principal de celle-ci consiste à tirer un revenu du commerce de titres, est réputé être un REATB prévoit aussi une exception établie en fonction du statut du contribuable canadien. Le Budget 2018 propose donc de modifier cette exception afin que certaines exigences minimales en matière de capital doivent également être satisfaites, conformément aux exigences devant être respectées afin de se prévaloir de l’exception semblable prévue à la définition d’« entreprise de placement ».

Ce changement s’appliquera aux années d’imposition d’une SEA qui commencent à compter du 27 février 2018.

Dépouillement de surplus transfrontalier

La LIR prévoit actuellement diverses règles visant à empêcher le « dépouillement de surplus ». Les dispositions particulières prévues à l’article 212.1 de la LIR empêchent la création d’un capital versé transfrontalier supplémentaire lorsqu’un non-résident du Canada transfère des actions d’une société canadienne à une autre société canadienne apparentée. Ces règles prévoient un dividende réputé correspondant au montant de la contrepartie autre qu’en actions qui excède le capital versé transfrontalier des actions de la société transférée. À l’heure actuelle, l’article 212.1 ne s’applique pas expressément à la disposition d’une société de personnes ou d’une fiducie qui détient une participation dans les actions d’une société canadienne.

Le ministère des Finances s’est dit préoccupé par le fait que certains contribuables utilisent les sociétés de personnes et les fiducies en tant qu’intermédiaires afin d’éviter d’être assujettis à l’article 212.1 et créent de façon inappropriée un capital versé transfrontalier ou dépouillent le surplus d’une société canadienne en n’imposant pas la retenue d’impôt sur le dividende. Cela peut être fait, par exemple, en transférant des actions d’une société canadienne à une société de personnes ou une fiducie, la participation de la société de personnes ou de la fiducie étant à son tour transférée à une société canadienne avec laquelle la société de personnes ou la fiducie a un lien de dépendance. En outre, le ministère des Finances est préoccupé par la planification visant à éviter l’application de règles semblables prévues à l’article 128.1 qui s’appliquent dans le contexte de l’immigration de sociétés. Le Budget 2018 propose des modifications afin d’empêcher une telle planification.

Le Budget 2018 contient certaines des modifications requises et qualifie la nouvelle règle anti-évitement de règle de transparence détaillée pour les sociétés de personnes et les fiducies. Cette règle attribuera l’actif, le passif et les opérations d’une société de personnes ou d’une fiducie à ses membres ou bénéficiaires, selon le cas, en fonction de la juste valeur marchande relative de leurs participations.

De plus, le Budget 2018 propose de réviser la définition du terme « montant des capitaux propres » aux fins de la règle de capitalisation restreinte et des règles prévues au paragraphe 84(1) afin d’empêcher les contribuables de bénéficier de surplus d’apport généré dans une opération à laquelle s’applique la règle contre le dépouillement de surplus de l’article 212.1.

Ces changements s’appliqueront aux opérations réalisées à compter du 27 février 2018.

Dans les récents budgets, le ministère des Finances a formulé des déclarations intéressées concernant l’application de la règle générale anti-évitement (la « RGAE ») aux opérations qui seront visées par les nouvelles règles, mais qui ont été entreprises avant le budget. Le Budget 2018 contient une déclaration intéressée semblable relativement aux règles contre le dépouillement de surplus. Cette déclaration est encore plus détaillée que les versions précédentes et va jusqu’à affirmer que tout recours à des participations discrétionnaires ayant pour but d’obtenir des « résultats inappropriés » en vertu du mécanisme d’attribution proposé, ou à « d’autres planifications qui cherchent à obtenir indirectement ce qu’il n’est pas possible d’obtenir directement » en vertu de ces règles contre le dépouillement de surplus (vraisemblablement les articles 212.1 et 128.1), « iraient à l’encontre de l’intention de la politique de ces règles » et il est anticipé qu’ils seraient contestés au moyen des règles existantes, y compris la RGAE. Cette déclaration tombe tout juste après que la cour a refusé dans l’affaire Oxford Properties d’accorder un poids quelconque à de telles déclarations intéressées concernant l’objet d’autres dispositions législatives. Il reste à voir dans quelle mesure les tribunaux accepteront cette déclaration concernant la politique de ces règles dans le contexte de l’analyse de la RGAE.

Période de nouvelle cotisation

La LIR prévoit des délais de prescription précis après lesquels l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») ne pourra généralement pas établir une nouvelle cotisation à l’égard d’une année d’imposition en particulier (la « période normale de nouvelle cotisation »). La période normale de nouvelle cotisation est habituellement de trois (3) ans à compter de la date d’envoi du premier avis de cotisation pour une année d’imposition donnée pour un particulier ou une société privée sous contrôle canadien (une « SPCC »), et de quatre ans pour les sociétés qui ne sont pas des SPCC. Ces périodes sont prolongées de trois (3) années supplémentaires dans chaque cas dans diverses circonstances, notamment dans le cas d’opérations avec des non-résidents ayant un lien de dépendance.

Le Budget 2018 propose de prolonger les délais de prescription applicables aux nouvelles cotisations dans trois autres situations.

  1. Sociétés étrangères affiliées

La période normale de nouvelle cotisation est généralement prolongée de trois (3) ans dans le cas de nouvelles cotisations établies par suite de la conclusion d’une opération impliquant un contribuable et une personne non résidente avec laquelle le contribuable a un lien de dépendance. Le Budget 2018 précise que les cotisations relatives aux SEA d’un contribuable prennent généralement beaucoup de temps, car elles comportent souvent des renseignements provenant de juridictions étrangères. Même si bon nombre de cotisations relatives à des SEA seront déjà assujetties à la période de nouvelle cotisation prolongée, il est proposé dans le Budget 2018 de prolonger de trois (3) ans la période de nouvelle cotisation à l’égard du revenu obtenu relativement à une SEA.

Cette mesure s’appliquera aux années d’imposition qui commencent à compter du 27 février 2018.

  1. Reports rétrospectifs de pertes

La LIR prévoit déjà que si les pertes d’une année donnée (l’« année de la perte ») sont reportées rétrospectivement et prises en compte dans le calcul du revenu imposable d’une année antérieure (l’« année du report rétrospectif »), le délai de prescription à l’égard de l’année du report rétrospectif est prolongé de trois (3) ans. Cette règle vise à s’assurer que l’année du report rétrospectif ne soit pas prescrite (de sorte que l’ARC ne soit pas en mesure d’établir une nouvelle cotisation à l’égard de l’utilisation de la perte reportée) avant l’année de la perte. Par contre, cette règle ne tient pas compte du fait que le délai de prescription applicable à l’année de la perte peut être prolongé de trois (3) ans dans certaines circonstances.

Le Budget 2018 propose de prolonger de six (6) ans (soit trois (3) ans de plus que la règle en vigueur) la période normale de nouvelle cotisation pour une année de report, dans la mesure où la nouvelle cotisation se rapporte au rajustement du report rétrospectif de la perte, lorsque, à la fois :

  • une nouvelle cotisation est établie pour une année de la perte à la suite d’une opération impliquant un contribuable et une personne non résidente avec laquelle le contribuable a un lien de dépendance;
  • la nouvelle cotisation réduit la perte du contribuable qui est disponible pour report rétrospectif;
  • la totalité ou une partie de cette perte avait effectivement été reportée à l’année du report rétrospectif.

Cette règle prolongera la période de nouvelle cotisation jusqu’à la date qui tombe soit 9 ou 10 ans après la date d’envoi de la cotisation initiale pour l’année du report rétrospectif. Ces délais sont plus longs que les autres délais de prescription actuellement fixés dans la LIR. 

Ce changement s’appliquera aux années d’imposition au cours desquelles une perte est réclamée rétrospectivement, étant entendu que cette perte est reportée rétrospectivement d’une année d’imposition qui se termine le 27 février 2018 ou après.

D’après notre compréhension, cette règle s’appliquera aux vérifications réalisées dans le cours normal des activités. Ceci étant dit, il est proposé de prolonger (de trois (3) ans) la période de nouvelle cotisation pour l’année du report rétrospectif de façon à faire correspondre cette période à la période au cours de laquelle un contribuable s’attend à ce que l’ARC établisse une nouvelle cotisation pour l’année de la perte. Cette règle ne vise apparemment pas à accorder plus de temps pour les nouvelles cotisations conséquentes d’une année de report rétrospectif à la suite de contestations et d’appels qui s’éternisent à l’égard de l’année de la perte, ce qui pourrait en théorie prolonger le délai au-delà même de la nouvelle période de nouvelle cotisation. La règle relative à une nouvelle cotisation conséquente prévue dans la LIR, qui accorde un (1) an à l’ARC après l’expiration des droits de contestation et d’appel pertinents pour établir de nouvelles cotisations à la suite d’une modification du « solde » (comprenant les pertes), s’applique uniquement lorsque le solde applicable est utilisé au cours d’une année subséquente.

  1. Demandes péremptoires de renseignements et ordonnances d’exécution

La LIR offre divers outils de vérification puissants permettant à l’ARC d’accéder aux documents et aux renseignements qu’elle juge pertinents quant au respect de la LIR. Elle prévoit notamment des demandes péremptoires de production de documents ou de renseignements (demandes péremptoires de renseignements détenus au Canada), des demandes péremptoires de production de documents ou de renseignements qui sont disponibles ou se trouvent hors du Canada (demandes péremptoires de renseignements détenus à l’étranger) et des ordonnances judiciaires exigeant la production de documents ou de renseignements demandées en vertu du pouvoir général de vérification ou d’une demande péremptoire de renseignements détenus au Canada (ordonnances d’exécution).

La LIR confère aux contribuables le droit de demander à la Cour fédérale le contrôle judiciaire d’une demande péremptoire de renseignements détenus à l’étranger. En conséquence, elle prévoit que la période entre la date où une demande de contrôle judiciaire est présentée à la Cour fédérale et la date où la demande est réglée n’est pas prise en compte dans le calcul de la période normale de nouvelle cotisation ou de tout autre délai de prescription prévu au paragraphe 152(4) de la LIR.

Bien que les contribuables aient le droit de demander le contrôle judiciaire des demandes péremptoires de renseignements détenus au Canada et de contester les demandes d’ordonnance d’exécution, aucune règle similaire relative au temps ne suspend le délai de prescription pendant ces contestations judiciaires.

Il est proposé dans le Budget 2018 d’instaurer une nouvelle règle de suspension de la prescription pour que des prolongations similaires s’appliquent aux périodes de nouvelle cotisation applicables lorsqu’un contribuable conteste une demande péremptoire de renseignements détenus au Canada ou une ordonnance d’exécution devant les tribunaux.

Ces modifications s’appliquent à l’égard des contestations intentées après la sanction royale de la loi habilitante.

Modifications relatives aux conventions fiscales

Au cours de l’été 2017, le Canada a signé la Convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (instrument multilatéral, ou « IM »). Lorsqu’il entrera en vigueur, l’IM aura notamment pour effet d’introduire un « critère de l’objet principal » dans la plupart des conventions fiscales du Canada (à l’exclusion notable de la Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis, qui contient déjà une règle détaillée sur les restrictions apportées aux avantages) afin de lutter contre ce qui est communément appelé le « chalandage fiscal ».

Selon le Budget 2018, l’IM représente une priorité de haut niveau pour le gouvernement, et celui‑ci entend l’adopter et le ratifier afin de le faire entrer en vigueur.

MESURES VISANT L'IMPÔT DES SOCIÉTÉS

Revenu de placement passif

Le ministère des Finances a d’abord annoncé en juillet 2017 des propositions détaillées sur l’imposition des sociétés privées, y compris les SPCC. La période de consultation sur ces propositions a suscité de nombreux commentaires de la part d’un large éventail d’intervenants. À la suite de ces commentaires, le ministère des Finances a annoncé qu’il retirait les propositions visant à limiter l’accès à l’exonération cumulative des gains en capital et à la « conversion » des dividendes en gains en capital, mais qu’il mettrait en œuvre des mesures ayant trait à la répartition du revenu et limiterait les avantages de report dont peuvent se prévaloir par ailleurs les sociétés privées qui gagnent un revenu passif supérieur à 50 000 $ CA par année. Des propositions révisées sur la répartition du revenu ont été publiées le 13 décembre 2017.

Dans le Budget 2018, le gouvernement confirme son intention de mettre en œuvre ces propositions relatives à la répartition du revenu et donne le détail des mesures très attendues portant sur le revenu passif gagné au sein de sociétés privées. Les mesures introduites pour limiter les avantages conférés aux SPCC qui gagnent un revenu passif supérieur à 50 000 $ CA par année représentent un changement moins radical du régime d’imposition des sociétés privées en général que certaines des idées émises dans le livre blanc initial de juillet 2017. Cette modification est la bienvenue et reflète une grande part des commentaires formulés pendant la période de consultation.

Plafond des affaires des SPCC

Les SPCC bénéficient de la « déduction accordée aux petites entreprises », qui leur octroie effectivement un taux réduit d’imposition fédéral du revenu des sociétés de 10,5 % sur la première tranche de 500 000 $ CA de leur revenu provenant d’une entreprise exploitée activement admissible. Dans le Budget 2018, le gouvernement confirme son intention, annoncée auparavant, de réduire ce taux à 10 % pour 2018 et à 9 % pour les années suivantes.

Il est proposé dans le Budget 2018 de réduire le montant maximal du revenu provenant d’une entreprise exploitée activement qui peut bénéficier de la déduction accordée aux petites entreprises (le « plafond des affaires ») selon la méthode linéaire pour les SPCC dont le revenu passif se situe entre 50 000 $ CA et 150 000 $ CA. Les SPCC dont le revenu passif dépasse 150 000 $ CA pour une année d’imposition donnée n’auraient pas droit à la déduction accordée aux petites entreprises. Cette modification n’aura d’incidence sur une SPCC que dans la mesure où son revenu provenant d’une entreprise exploitée activement admissible dépasse son plafond des affaires réduit. Par exemple, une SPCC qui gagne un revenu passif de 100 000 $ CA verra son plafond des affaires réduit à 250 000 $ CA. Le revenu provenant d’une entreprise exploitée activement supérieur à ce plafond réduit sera assujetti au taux général d’imposition des sociétés.

Dans le Budget 2018, la fourchette de 50 000 $ CA à 150 000 $ CA de revenu passif faisant l’objet de la réduction est expliquée en fonction d’hypothèses ayant trait aux taux de rendement des placements passifs. Par exemple, en supposant un taux de rendement des placements de 5 %, la limite inférieure de 50 000 $ CA dictée par la règle ne s’applique qu’aux SPCC possédant des placements passifs supérieurs à 1 M$ CA.

Les règles proposées ne permettent pas de reporter aux années ultérieures la « capacité » inutilisée de gagner un revenu passif, ni ne prévoient l’indexation du plafond pour tenir compte de l’inflation ou de l’évolution des taux d’intérêt. Par conséquent, les SPCC qui gagnent un revenu passif inférieur à 50 000 $ CA au cours d’une année donnée seront assujetties aux mêmes limites que toute autre SPCC au cours des années ultérieures. Comme il est indiqué ci‑dessous, les SPCC ne pourront pas non plus porter les pertes en capital nettes d’années antérieures ou ultérieures en réduction de leur revenu passif aux fins de ces règles.

Aucune disposition relative aux droits acquis ne vise les gains accumulés jusqu’au 27 février 2018.

Revenu de placement total ajusté

Aux fins du calcul du plafond des affaires réduit d’une SPCC, le Budget 2018 contient une nouvelle définition du « revenu de placement total ajusté », qui reposera sur le « revenu de placement total » de la SPCC servant à calculer les impôts remboursables relativement au revenu de placement d’une SPCC, compte tenu de certains ajustements. Ces ajustements comprendront les suivants :

  • Les gains et pertes en capital imposables seront exclus dans la mesure où ils proviennent de la disposition de « biens actifs », qui comprennent ce qui suit :
      1. Un bien utilisé principalement dans le cadre d’une entreprise exploitée activement au Canada par la SPCC ou une SPCC liée;
      2. Une action d’une autre SPCC qui est « rattachée » à la SPCC donnée et qui, si la SPCC était un particulier, serait une « action admissible de petite entreprise » aux fins de l’exonération cumulative des gains en capital;
      3. Une participation dans une société de personnes si la participation de la SPCC donnée dans la société de personnes est égale ou supérieure à 10 % de la juste valeur marchande totale de toutes les participations dans la société de personnes et que la société de personnes satisfait à des critères relatifs aux actifs similaires à ceux que doit respecter une SPCC pour être admissible à titre de société exploitant une petite entreprise;
  • Les pertes en capital nettes reportées d’autres années d’imposition seront exclues;
  • Les dividendes de sociétés non rattachées seront ajoutés;
  • Le revenu tiré de l’épargne accumulée dans le cadre d’une police d’assurance‑vie qui n’est pas une police exonérée sera ajouté, dans la mesure où il n’est pas par ailleurs inclus dans le revenu de placement total.

L’omission des pertes en capital reportées d’années antérieures ou ultérieures constitue le plus étonnant de ces ajustements. Cette exclusion peut s’avérer punitive pour les SPCC qui effectuent des placements plus risqués, obtenant donc des taux de rendement plus élevés certaines années et des pertes au cours d’autres années. Il est difficile de comprendre pourquoi la politique sous-tendant les règles relatives aux reports prospectifs et rétrospectifs en général ne s’appliquerait pas à ces nouvelles règles.

Conformément aux règles existantes, le revenu de placement total ajusté exclura le revenu qui est accessoire à une entreprise exploitée activement.

Dans le Budget 2018, des règles anti-évitement connexes sont également proposées afin d’empêcher que diverses mesures, notamment l’établissement d’une année d’imposition écourtée et le transfert de biens à des sociétés liées mais non associées, permettent d’échapper effectivement à l’incidence de ces modifications.

Ces modifications s’appliqueront aux années d’imposition commençant après 2018.

Remboursement des impôts sur le revenu de placement

Le régime actuel applicable aux SPCC comprend l’imposition d’impôts remboursables sur le revenu de placement gagné par les sociétés privées. Ces impôts donnent généralement lieu à un « impôt en main remboursable au titre de dividendes » (un « IMRTD »), qui peut être remboursé à la suite du versement de dividendes imposables suffisants. Dans le cadre du régime actuel, tous les dividendes imposables, qu’ils soient ou non désignés à titre de « dividendes déterminés », peuvent donner lieu au remboursement de l’IMRTD.

Dans le Budget 2018, le gouvernement propose d’importantes modifications touchant les règles relatives à l’IMRTD.

Le revenu de placement que gagne une SPCC ne donne généralement pas lieu à des ajouts au « compte de revenu à taux général » de cette dernière et n’accroît donc pas sa capacité de verser des dividendes déterminés. Les dividendes déterminés versés à des particuliers résidant au Canada sont assujettis à un taux d’imposition effectif d’environ 5 % à 11 % inférieur, selon la province, à celui des dividendes non déterminés.

Toutefois, une société peut actuellement obtenir un remboursement de l’IMRTD à la suite du versement de tout dividende imposable, qu’il soit qualifié de déterminé (assujetti à un taux d’imposition moindre pour les particuliers bénéficiaires) ou non. Il en résulte une possibilité de report, en particulier pour les grandes SPCC qui peuvent verser des dividendes déterminés provenant d’un important compte de revenu actif afin de recouvrer l’impôt remboursable sur le revenu de placement qui ne donne pas lui‑même à la société la capacité de verser des dividendes déterminés sans pénalité. Le Budget 2018 traite la possibilité de report perçue que crée cette dichotomie en introduisant deux nouveaux comptes d’IMRTD :

  • Les impôts remboursables payés en vertu de la partie IV de la LIR sur les dividendes « de portefeuille » déterminés (c’est-à-dire les dividendes déterminés versés par des sociétés non rattachées) seront généralement consignés dans le compte d’IMRTD déterminé; tout dividende versé par une société, qu’il soit déterminé ou non déterminé, donnera à la société le droit à un remboursement de son IMRTD déterminé, sous réserve d’un ordre d’application (décrit ci‑dessous).
  • Les impôts remboursables payés en vertu de la partie I de la LIR sur le revenu de placement ainsi que les impôts remboursables payés en vertu de la partie IV sur les dividendes « de portefeuille » non déterminés seront consignés dans le compte d’IMRTD non déterminé; les remboursements d’IMRTD non déterminé ne pourront être obtenus que par suite du versement de dividendes non déterminés.

Selon l’ordre d’application proposé, à la suite du versement d’un dividende non déterminé, une société devra d’abord obtenir le remboursement de tout IMRTD non déterminé.

Les sociétés qui doivent de l’impôt en vertu de la partie IV à l’égard du remboursement de dividende reçu par une société rattachée versant le dividende devront ajouter le montant au compte d’IMRTD correspondant au compte d’IMRTD depuis lequel la société rattachée versant le dividende a reçu un remboursement.

Le compte d’IMRTD existant d’une société sera réparti entre l’IMRTD déterminé et l’IMRTD non déterminé comme suit :

  • Dans le cas d’une SPCC, un montant égal au moindre de son solde d’IMRTD existant ou de 38 1/3 % de son « compte de revenu à taux général » sera affecté à son compte d’IMRTD déterminé, et tout solde restant sera affecté à son compte d’IMRTD non déterminé.
  • Dans le cas de toute autre société, tout son solde d’IMRTD existant sera affecté à son compte d’IMRTD déterminé.

Les modifications apportées au régime de l’IMRTD s’appliqueront aux années d’imposition commençant après 2018, et des règles anti-évitement empêcheront le report d’une telle application par suite de l’établissement d’années d’imposition écourtées.

Règles sur les fractions à risques pour les paliers de sociétés de personnes

Comme prévu, le Budget 2018 prévoit des mesures pour donner suite à la décision de la Cour d’appel fédérale (la « CAF ») dans l’affaire La Reine c. Green (l’« affaire Green ») concernant le traitement des pertes dans une structure de société de personnes à paliers multiples. Toutefois, les propositions vont plus loin que prévu et éliminent certaines pertes existantes qui résultaient de telles structures.

En général, comme une société de personnes est une entité intermédiaire aux fins de l’impôt, un contribuable peut déduire les pertes réalisées par une société de personnes dont il est un associé. Le contribuable qui est un commanditaire ne peut déduire les pertes de la société de personnes que dans la mesure de sa « fraction à risques », soit généralement le montant qu’il a investi dans la société de personnes. L’excédent est appelé « perte comme commanditaire », et le contribuable peut, au cours d’une année ultérieure, le porter en déduction du revenu qui lui est attribué par la société de personnes dans la mesure où il a une fraction à risques relativement à la société de personnes au cours de cette année ultérieure.

Selon la position de longue date de l’ARC, les pertes réalisées par une société de personnes (société de personnes de palier inférieur) ne pouvaient pas être déduites par un associé qui était une autre société de personnes (société de personnes de palier supérieur) dans la mesure où les pertes dépassaient la fraction à risques de la société de personnes de palier supérieur relativement à la société de personnes de palier inférieur. Cette position était considérée comme un piège pour les contribuables cherchant à investir dans des structures de société de personnes à paliers multiples.

Dans l’affaire Green, la CAF déclare que la position de longue date de l’ARC est erronée et que la limite relative à la fraction à risques ne s’applique pas à une société de personnes de palier supérieur. Par conséquent, les pertes réalisées par une société de personnes de palier inférieur pourraient être déduites dans le calcul du revenu de la société de personnes de palier supérieur sans égard aux règles sur les fractions à risques. De telles pertes pourraient être attribuées aux associés de la société de personnes de palier supérieur, sous réserve de leurs fractions à risques.

Dans l’affaire Green, la Couronne soutenait que les règles sur les fractions à risques pouvaient être évitées complètement en utilisant une société en nom collectif comme société de personnes de palier supérieur (les associés d’une société en nom collectif ne sont pas assujettis aux règles sur les fractions à risques). La CAF a reconnu qu’un tel résultat n’était vraisemblablement pas voulu et a demandé une modification législative.

En réponse à l’affaire Green, le Budget 2018 comporte une proposition selon laquelle les pertes d’une société de personnes de palier inférieur attribuées à une société de personnes de palier supérieur au‑delà de la fraction à risques de la société de personnes de palier supérieur ne seront pas déductibles dans le calcul du revenu de cette dernière (et ne pourront donc pas être attribuées aux associés de celle‑ci). L’excédent ne constituera pas une perte comme commanditaire et sera donc complètement perdu, rétablissant ainsi la position de longue date de l’ARC. Dans la mesure où cette nouvelle règle rend les pertes inutilisables, la réduction du prix de base rajusté de la participation de la société de personnes de palier supérieur dans la société de personnes de palier inférieur sera annulée.

Bien que ces mesures s’appliquent aux années d’imposition prenant fin à compter du 27 février 2018, elles comprennent des règles qui élimineront les pertes existantes d’un contribuable qui résultaient d’une perte attribuée par une société de personnes de palier inférieur au‑delà de la fraction à risques d’une société de personnes de palier supérieur (convertissant effectivement la perte de façon à la prendre en compte dans le prix de base rajusté, pour le contribuable, de sa participation dans la société de personnes). Dans la mesure où un contribuable a porté en déduction de son revenu les pertes d’une structure de société de personnes à paliers multiples au cours d’une année ayant pris fin avant le 27 février 2018, ces mesures n’auront pas d’incidence sur une telle déduction.

Pertes artificielles obtenues au moyen d’arrangements financiers fondés sur des capitaux propres

Dans le Budget 2018, la tendance se poursuit en mettant en place des règles conçues pour limiter les avantages fiscaux considérés inappropriés lors de l’utilisation de transactions structurées et visant des instruments dérivés sur capitaux propres conclues par des institutions financières.

Plus particulièrement, le Budget 2018 présente des modifications aux régimes existants relatifs aux mécanismes de transfert des dividendes (les « MTD ») et de prêt de valeurs mobilières (les « PVM ») afin de cibler certaines opérations qui, selon le gouvernement, servent à réaliser des pertes fiscales artificielles de façon inappropriée.

Arrangements de capitaux propres synthétiques

Aux termes du régime relatif aux MTD, la déduction concernant les dividendes intersociétés reçus n’est généralement pas permise, notamment lorsqu’un contribuable reçoit un dividende sur une action faisant l’objet d’un MTD. Le budget fédéral de 2015 a considérablement élargi le régime relatif aux MTD en étendant la définition du terme « mécanisme de transfert de dividendes » pour qu’elle comprenne les « arrangements de capitaux propres synthétiques » (les « ACPS »). En général, un ACPS est un arrangement (habituellement un ou plusieurs instruments dérivés) aux termes duquel un contribuable transfère à un « investisseur indifférent relativement à l’impôt » (tel un investisseur exonéré d’impôt ou un non-résident) les possibilités de subir des pertes et de réaliser des gains relativement à une action. Aux termes d’un tel arrangement, le contribuable reçoit un dividende sur l’action et verse un paiement de dividende par équivalence à l’investisseur indifférent relativement à l’impôt. Sauf en ce qui a trait à l’inclusion des ACPS dans la définition d’un MTD, le contribuable pourrait réclamer une déduction pour dividendes reçus à l’égard du dividende et une déduction pour le paiement de dividende par équivalence versé à l’investisseur indifférent relativement à l’impôt – une double déduction en réalité.

Dans leur forme actuelle, les règles relatives aux ACPS ne s’appliquent pas lorsqu’un contribuable peut démontrer qu’aucun investisseur indifférent relativement à l’impôt n’a, en totalité ou en presque totalité, les possibilités de subir des pertes et de réaliser des gains ou des bénéfices relativement à une action en raison d’un ACPS. Il est indiqué dans le Budget 2018 que certains contribuables ont eu recours à cette exception de façon inappropriée en transférant à un investisseur indifférent relativement à l’impôt, en totalité ou en presque totalité, les possibilités de subir des pertes et de réaliser des gains ou des bénéfices relativement à une action par un autre moyen qu’un ACPS. Le gouvernement propose dans le Budget 2018 de modifier l’exception afin qu’elle s’applique uniquement lorsque la totalité ou la presque totalité des possibilités de subir des pertes et de réaliser des gains ou des bénéfices relativement à une action n’ont pas été transférées à un investisseur indifférent relativement à l’impôt ou à un groupement affilié d’investisseurs indifférents relativement à l’impôt, en raison d’un ACPS ou autrement.

Cette mesure s’appliquera aux dividendes qui sont payés à compter du 27 février 2018.

Mécanismes de prêt de valeurs mobilières

Il est également indiqué dans le Budget 2018 que des contribuables utilisent des opérations de prêts de valeurs mobilières et de rachat d’actions qui sont volontairement structurées de sorte qu’elles ne remplissent pas tous les critères des mécanismes de PVM pour l’application de la LIR afin de créer des pertes artificielles dans des cas qui sont similaires aux règles existantes relatives aux ACPS, mais qui ne seraient pas couvertes par ces règles. Aux termes d’un tel mécanisme, un contribuable qui est une société emprunte une action canadienne auprès d’un tiers avec l’obligation de remettre une action identique à ce tiers ultérieurement et, dans l’intervalle, de verser des paiements de dividende par équivalence à la contrepartie. Dans une telle situation, le contribuable réclamerait une déduction pour dividendes reçus relativement aux dividendes sur l’action. Le contribuable réclamerait également une déduction à l’égard du paiement de dividende par équivalence du fait que les restrictions quant à la déductibilité des paiements de dividende par équivalence, selon les règles applicables aux PVM, ne s’appliquent pas puisque l’opération n’est pas un PVM.

Si un tel mécanisme était couvert par les règles existantes relatives aux PVM, les règles relatives aux MTD s’appliqueraient et la déduction pour dividendes reçus serait refusée.

Un nouveau concept à cet effet est présenté dans le Budget 2018 : le prêt de valeurs mobilières déterminé (un « PVMD »), qui est un arrangement (autre qu’un PVM) aux termes duquel :

  1. une personne prête une action d’un émetteur assujetti, ou coté, à une autre personne;
  2. il peut être raisonnable de s’attendre à ce que l’autre personne remettra une action identique à la personne;
  3. les possibilités de subir des pertes et de réaliser des gains ne sont pas modifiées de quelque façon que ce soit.

La définition du terme PVMD est plus large que la définition existante de PVM, qui oblige également un emprunteur de valeurs mobilières à effectuer des paiements au prêteur des valeurs mobilières à titre compensatoire pour les dividendes sur l’action empruntée. La définition de paiement compensatoire au titre d’un PVM sera également modifiée afin d’englober les paiements de dividende par équivalence aux termes d’un PVMD, de sorte que certaines règles applicables à la réception et au versement de paiements compensatoires au titre de PVM s’appliqueront aux paiements de dividende par équivalence, également aux termes d’un PVMD (y compris le traitement réputé des paiements de dividende par équivalence en tant que dividendes aux termes des règles relatives aux PVM de sorte que les règles relatives aux MTD s’appliqueront à l’égard de l’arrangement).

Par conséquent, si un contribuable a recours à un PVMD à l’égard d’une action, le contribuable ne pourra pas réclamer une déduction pour dividendes reçus relativement aux dividendes reçus sur l’action lorsque les règles relatives aux MTD s’appliquent.

En outre, le Budget 2018 apporte des précisions sur l’application de la disposition régissant la déductibilité des paiements de dividende par équivalence. La première disposition prévoit généralement une déduction maximale des deux tiers des paiements de dividende par équivalence sur des actions canadiennes effectués par un courtier en valeurs mobilières inscrit. La deuxième disposition permet généralement à tous les contribuables d’obtenir une déduction complète à l’égard de ces paiements de dividende par équivalence effectués aux termes d’un PVM qui est également un MTD. Il est précisé dans le Budget 2018 que dans les cas où la deuxième disposition s’applique, la première ne s’applique pas.

Cette mesure s’appliquera aux paiements de dividende par équivalence effectués à compter du 27 février 2018, sauf si l’opération de prêt de valeurs mobilières ou de rachat de valeurs mobilières applicable était en place avant le 27 février 2018, en quel cas les modifications s’appliqueront aux paiements de dividende par équivalence effectués après le mois de septembre 2018.

Règle sur la minimisation des pertes dans les opérations de rachat d’actions

Les institutions financières sont généralement assujetties à des règles spéciales relatives aux actions qui sont considérées comme des biens évalués à la valeur du marché. En règle générale, les gains ou les pertes sur ces actions sont inclus dans le revenu, ou déduits de celui-ci, en totalité et doivent être inclus dans le revenu, ou déduits de celui-ci, selon la méthode d’évaluation à la valeur du marché sur une base annuelle. Les dividendes reçus ou réputés avoir été reçus sur une action d’une société canadienne sont généralement admissibles à une déduction complète lorsqu’ils sont reçus par une autre société canadienne. Les règles sur la minimisation des pertes pour dividendes imposent des restrictions sur la capacité de déduire des pertes lorsque des dividendes sur ces actions ont été reçus. Des règles spéciales sur la minimisation des pertes pour dividendes s’appliquent aux actions détenues par des institutions financières comme des biens évalués à la valeur du marché.

Lorsque des actions d’une société canadienne sont rachetées par l’émetteur, ce dernier est généralement réputé avoir payé un dividende correspondant à la différence entre le montant du rachat et le capital versé des actions rachetées. Ce type de dividende réputé a pour effet de réduire le produit de disposition aux fins du calcul du gain ou de la perte du contribuable découlant de la disposition de ces actions. Toute perte subie par le porteur peut être minimisée aux termes des règles sur la minimisation des pertes pour dividendes.

Aux termes des règles actuelles sur la minimisation des pertes pour dividendes applicables aux actions qui sont détenues par des institutions financières comme des biens évalués à la valeur du marché, la perte qui résulterait du rachat d’actions d’une société canadienne est minimisée uniquement dans la mesure où le coût initial de l’action excède son capital versé. La perte ne serait pas minimisée relativement au gain cumulatif net de l’institution financière sur l’action, selon l’évaluation à la valeur du marché. Le ministère des Finances craignait que, dans la mesure où une institution financière a couvert le risque de prix lorsqu’elle a acquis l’action, l’institution financière aurait déjà obtenu les déductions qui auraient entièrement compensé ce gain cumulatif selon l’évaluation à la valeur du marché. Par conséquent, le gouvernement propose dans son Budget 2018 que la perte subie sur le rachat d’actions d’une société canadienne détenues par une institution financière comme des biens évalués à la valeur du marché sera généralement réduite par le montant du dividende qui est réputé avoir été reçu relativement à ce rachat.

Cette proposition s’applique aux rachats d’actions ayant eu lieu à compter du 27 février 2018.

AUTRES MODIFICATIONS FISCALES

Déclaration pour les fiducies

Dans le Budget fédéral de 2017, le ministère des Finances a annoncé son intention d’examiner des moyens de renforcer les exigences en matière de déclaration fiscale pour les fiducies dans le but d’améliorer la collecte de renseignements sur la propriété effective. Dans le Budget 2018, le ministère des Finances donne suite à cette annonce en proposant de nouvelles exigences en matière de déclaration fiscale pour les fiducies.

Les nouvelles exigences imposent à certaines fiducies l’obligation de produire une déclaration de revenus dans les cas où cette obligation n’existe pas actuellement. Elles comportent également des exigences supplémentaires en matière de déclaration sur une base annuelle. Ces exigences s’appliqueront aux fiducies expresses (c’est-à-dire, les fiducies créées avec l’intention expresse de l’auteur, habituellement par écrit) résidant au Canada, ainsi qu’aux fiducies non-résidentes qui sont actuellement tenues de produire une déclaration.

Lorsque les nouvelles exigences de déclaration s’appliquent à une fiducie, celle-ci sera tenue de déclarer l’identité de tous les fiduciaires, bénéficiaires et constituants de la fiducie, ainsi que l’identité de chaque personne qui possède la capacité (par le mandat de la fiducie ou un accord connexe) d’exercer un contrôle sur les décisions du fiduciaire concernant l’affectation du revenu ou des capitaux de la fiducie (par exemple, un protecteur). Aucune proposition particulière n’a été prévue pour cette mesure dans l’AMVM du Budget 2018. Il sera intéressant de voir de quelle façon le concept de personne ayant la capacité d’exercer un contrôle est défini aux fins de l’application de ces règles.

Les types de fiducies suivants devraient être exemptés des exigences supplémentaires en matière de déclaration :

  • Fiducies de fonds commun de placement, fonds réservés et fiducies principales;
  • Fiducies régies par les régimes enregistrés;
  • Comptes en fidéicommis ou en fiducie des avocats;
  • Successions assujetties à l’imposition à taux progressifs et fiducies admissibles pour personne handicapée;
  • Fiducies admissibles à titre d’organisations à but non lucratif ou d’organismes de bienfaisance enregistrés;
  • Fiducies existant depuis moins de trois mois ou détenant moins de 50 000 $ CA en biens tout au long de l’année d’imposition (pourvu que ces actifs se limitent aux dépôts, aux titres de créance gouvernementale et aux titres cotés).

Ces nouvelles exigences en matière de déclaration s’appliqueront aux déclarations qui doivent être produites pour les années d’imposition se terminant pendant l’année 2021 ou après.

Financement des activités de mise en application de la loi et des tribunaux

Des efforts ont été déployés au cours des dernières années afin d’accroître l’efficacité des activités de vérification de l’ARC, en particulier celles qui s’appliquent à l’évitement fiscal. L’engagement de l’ARC à cet égard est réitéré dans le Budget 2018. Dans son Budget 2018, le ministère des Finances propose un financement supplémentaire pour l’ARC de 90,6 M$ CA sur cinq (5) ans afin de se pencher sur d’autres cas cernés au moyen des systèmes d’évaluation améliorée des risques, au pays et à l’étranger. Il propose également un autre financement de 38,7 M$ CA sur cinq (5) ans afin de permettre à l’ARC d’étendre ses activités de conformité internationales.

Le Budget 2018 prévoit également un financement supplémentaire de 41,9 M$ CA sur cinq ans destiné au Service administratif des tribunaux judiciaires, en plus d’un montant de 9,3 M$ CA par année de façon continue. Ce financement servira à aider les membres du personnel de première ligne du greffe et de la magistrature, dont la Cour canadienne de l’impôt, alors que les tribunaux gèrent un nombre croissant de dossiers de plus en plus complexes.

Mesures relatives à la TPS/TVH à l’égard des sociétés en commandite de placement

Comme il est décrit dans notre Bulletin Blakes de septembre 2017 intitulé Finances Canada lance une consultation sur de nouvelles propositions fiscales concernant les règles relatives aux sociétés de personnes en commandite de placement, le ministère des Finances a proposé d’imposer une taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée (TPS/TVH) sur les services de gestion et d’administration rendus par les commandités d’une société en commandite de placement, même si ceux-ci rendent ces services par obligation à titre d’associé de la société de personnes.

Dans son Budget 2018, le gouvernement suggère de modifier la proposition initiale du ministère des Finances de sorte que la TPS/TVH s’applique aux services de gestion et d’administration rendus par le commandité à compter du 8 septembre 2017, mais non aux services de gestion et d’administration rendus par le commandité avant le 8 septembre 2017, sauf si le commandité a exigé la TPS/TVH à l’égard de ces services avant cette date. De plus, il est proposé que la TPS/TVH soit généralement payable sur la juste valeur des services de gestion et d’administration au cours de la période de déclaration de la TPS/TVH (ou au cours de la période de facturation si les frais de service sont facturés) durant laquelle les services sont rendus, au moins dans les cas où les services sont rendus aux termes d’une entente.

En outre, les modifications proposées demeurent similaires à la proposition initiale et comprennent toujours les problèmes déjà cernés lorsque les règles ont été publiées pour la première fois par le ministère des Finances aux fins de commentaires. Les nouvelles modifications, conjuguées aux règles existantes, entraîneront vraisemblablement une surveillance accrue des activités des sociétés en commandite de placement et pourraient créer un terrain fertile pour les différends concernant la juste valeur marchande des services fournis par des commandités aux sociétés en commandite de placement.

Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec un membre de notre groupe Fiscalité.