Après les demandeurs dans les affaires Air Canada, Mazda et Kia Canada, toutes des actions collectives pour des infractions alléguées à la Loi sur la protection du consommateur (la « LPC »), c’est au tour du demandeur dans l’affaire Lussier c. Expedia inc. d’être débouté devant les tribunaux québécois. La Cour supérieure vient tout juste de rejeter dans son entièreté l’action collective que ce dernier avait entreprise contre Expedia inc. et d’autres plateformes en ligne de réservation d’hôtels (collectivement, « Expedia »). Le rejet de cette action collective dénote une tendance de plus en plus marquée en matière d’actions collectives, c’est-à-dire que des actions autrement autorisées sont finalement rejetées au mérite, en l’absence d’infraction de la part des défenderesses ou d’une preuve de préjudice subi par les consommateurs.
Dans l’affaire Expedia, le demandeur, qui avait réservé un séjour en ligne sur Expedia, se plaignait du fait que l’hôtel lui a exigé, une fois sur place, des « frais cachés » (ou frais hôteliers). Le demandeur reprochait à Expedia de ne pas avoir divulgué les frais hôteliers au moment où il avait réservé son séjour sur la plateforme en ligne. Selon lui, cette pratique contrevenait notamment à l’article 224 c) de la LPC, qui interdit au commerçant d’exiger pour un bien ou un service un prix supérieur à celui affiché. Dès lors, le demandeur réclamait, pour le compte des membres de l’action collective, le remboursement des frais hôteliers et des dommages punitifs à hauteur de 15 M$ CA. La Cour supérieure a rejeté dans son ensemble les prétentions du demandeur pour les motifs suivants.
Premièrement, la Cour s’est intéressée à la plateforme de réservation exploitée par Expedia pour constater qu’Expedia annonçait de manière claire et répétée au consommateur, et ce, tôt dans le processus de réservation, que des frais hôteliers s’ajouteraient au tarif et seraient payés sur place. La Cour a donc estimé que ces avertissements étaient suffisants pour alerter le consommateur de l’existence des frais hôteliers. Surtout, la Cour n’était pas prête à cautionner le comportement d’un consommateur « qui ne fait aucun effort pour connaître l’étendue de ses obligations » ou qui plaide sa propre turpitude, à l’instar du demandeur en l’espèce qui avait admis ne pas avoir lu le contrat qui le liait à Expedia. Pour ces raisons, la Cour a conclu à l’absence de pratique interdite en vertu de la LPC.
Deuxièmement, la Cour était d’avis que même si elle avait conclu à l’existence d’une pratique interdite, le demandeur n’avait pas prouvé ses dommages. Faisant écho aux enseignements de la Cour d’appel dans Mazda, elle a précisé que le simple fait qu’une pratique interdite ait eu lieu ne soustrait pas le demandeur de quantifier son préjudice s’il cherche à obtenir l’une des mesures de réparation prévues à l’article 272 de la LPC. Au surplus, l’octroi d’une telle mesure de réparation par le tribunal est discrétionnaire. Dans les circonstances, la Cour a conclu à l’absence de dommages étant donné qu’Expedia avertissait maintes fois les consommateurs de l’existence des frais hôteliers, qu’elle ne s’est pas enrichie avec les frais hôteliers et que le demandeur a pleinement bénéficié des services hôteliers achetés. Ces motifs ne sont pas sans rappeler ceux de l’affaire Air Canada, la toute première action collective fondée sur l’article 224 c) de la LPC tranchée au mérite et dont il est question dans notre Bulletin Blakes intitulé Prix supérieur au prix annoncé : où est le préjudice?.
Troisièmement, la Cour a refusé d’octroyer des dommages punitifs aux membres. Comme la pratique des frais hôteliers a été développée par les hôtels à l’insu d’Expedia, on ne peut conclure à du laxisme, à de la passivité ou à de l’ignorance de la part d’Expedia. Au contraire, sa conduite a été satisfaisante et proactive selon la Cour, puisque Expedia s’est assurée que les consommateurs étaient pleinement informés de l’existence des frais hôteliers.
Même si l’affaire Expedia est loin de sonner le glas des actions collectives fondées sur l’article 224 c) de la LPC, celle-ci met en exergue les difficultés auxquelles se heurtent les consommateurs qui entreprennent de telles actions. Pour l’instant, les tribunaux n’ont pas été convaincus de l’existence d’une pratique interdite ou d’un préjudice, surtout lorsque des avertissements visant le prix ont été faits aux consommateurs et que ceux-ci ont bénéficié des biens ou des services achetés auprès du commerçant.
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