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Infolettre sur les régimes de retraite, les avantages sociaux et la rémunération des hauts dirigeants – avril 2020

8 mai 2020

Voici le 27e numéro de l’Infolettre sur les régimes de retraite, les avantages sociaux et la rémunération des hauts dirigeants de Blakes. La présente infolettre donne un aperçu des faits récents en jurisprudence qui ont une incidence sur les régimes de retraite et les prestations. Veuillez noter cependant qu’elle ne vise pas à constituer un avis juridique.

Pour obtenir de plus amples renseignements ou pour discuter de la façon dont l’un ou l’autre aspect de ces faits récents pourrait avoir des répercussions sur votre situation, veuillez communiquer avec un membre du groupe Régimes de retraite, avantages sociaux et rémunération des hauts dirigeants de Blakes.

DANS CE NUMÉRO

DÉSIGNATION DE BÉNÉFICIAIRES

  • Earl v. McAllister, 2019 ONSC 7288

INTERPRÉTATION DES CLAUSES D’UN RÉGIME DE RETRAITE

  • Austin v. Bell Canada, 2020 ONCA 142

DROIT DE LA FAMILLE

  • Kraft v. Kraft, 2020 BCSC 283

  • Miaskowski v. MacIntyre, 2020 ONCA 178

COMPÉTENCE À L’ÉGARD D’UN RÉGIME DE PENSION

  • Canada (Procureur général) v. Northern Inter-Tribal Health Authority Inc., 2020 CFA 63

NÉGOCIATION COLLECTIVE

  • Teamsters Canada Rail Conference, Division 660 v. Bombardier Transportation – North America, 2020 CanLII 12641 (ON LRB)

AVANTAGES RELATIFS À LA SANTÉ ET AU BIEN-ÊTRE

  • Hutton v. The Manufacturers Life Insurance Company (Manulife Financial), 2019 ONCA 975

DÉSIGNATION DE BÉNÉFICIAIRES

Earl v. McAllister, 2019 ONSC 7288

Leo McAllister (le « défunt ») est décédé par suite d’une lutte contre le cancer, laissant dans le deuil deux enfants mineurs (les « garçons »). L’ex-conjointe du défunt, Tammy McAllister (la « demanderesse »), a présenté une demande de pension alimentaire au nom des garçons contre la conjointe survivante du défunt, Barbara McAllister (la « défenderesse »). À la date du décès du défunt, ce dernier détenait des droits au titre de deux régimes de retraite syndicaux. La défenderesse était la bénéficiaire désignée aux fins du premier régime de retraite (le « régime 1 »). Le défunt avait signé les consentements nécessaires pour désigner les garçons comme bénéficiaires du régime 1. Bien que ces formulaires aient été envoyés par la poste, ils n'ont jamais été reçus par l'administrateur du régime. Le deuxième régime de retraite (le « régime 2 ») prévoyait le versement d'une somme forfaitaire de 88 177,40 $ CA à la conjointe survivante avant la retraite du défunt. La défenderesse, en tant que conjointe survivante du défunt, avait choisi de recevoir ce montant sous forme de versements mensuels à vie de 376 $ CA.

La demanderesse a présenté la preuve selon laquelle le défunt avait l’intention de modifier les bénéficiaires pour le régime 1 et le régime 2, et que la valeur totale de la succession du défunt (y compris les prestations accumulées aux termes des régimes 1 et 2) soit versée aux garçons. Selon la preuve présentée par la défenderesse, le défunt avait pour intention que seules les prestations aux termes du régime 1 soient versées aux garçons, conformément au formulaire de désignation de bénéficiaires pour le régime 1 qu’il avait signé et fait parvenir à l’administrateur de ce régime.

La question que devait trancher la Cour supérieure de justice de l’Ontario (la « Cour ») consistait à déterminer si les prestations versées à la conjointe survivante aux termes du régime 2 devait être incluses dans les actifs de la succession en vertu de l’alinéa 72 (1) g) de la Loi portant réforme du droit des successions (la « Loi ») aux fins de la détermination d’une pension alimentaire pour des personnes à charge.

Dans son analyse, la Cour a passé en revue la jurisprudence pertinente, y compris la décision rendue dans l’affaire Cotnam v. Rousseau, 2018 ONSC 216 (l’« affaire Cotnam ») que nous avons présentée dans notre Infolettre sur les régimes de retraite d’août 2018. Dans cette affaire, la Cour avait déterminé que la priorité des conjoints à l’égard des prestations de décès avant la retraite en vertu de l’article 28 de la Loi sur les régimes de retraite de l’Ontario ne pouvait empêcher la récupération de telles prestations versées à un conjoint en vertu de l’alinéa 72 (1) g) de la Loi. Dans la présente affaire, la Cour n’était pas d’accord avec la décision rendue dans l’affaire Cotnam. Elle a conclu que le libellé de l’alinéa 72 (1) g) de la Loi était clair et porte uniquement sur les montants payables aux termes d’une désignation de bénéficiaire. La prestation de décès avant la retraite versée à la conjointe survivante aux termes du régime 2 n’est pas versée aux termes d’une désignation de bénéficiaire; elle est versée plutôt à la défenderesse en sa qualité de conjointe survivante. La Cour a donc déterminé que la prestation de décès avant la retraite payable à la défenderesse au titre du régime 2 ne devait pas être incluse dans les actifs du défunt aux fins de la demande de pension alimentaire en vertu de la Loi.

Décision de la Cour supérieure de justice de l’Ontario

INTERPRÉTATION DES CLAUSES D’UN RÉGIME DE RETRAITE

Austin v. Bell Canada, 2020 ONCA 142

Cette action collective portait sur l'examen d'une disposition du régime de retraite de Bell Canada (le « régime »). La Cour d'appel de l'Ontario (la « Cour d'appel ») devait se pencher sur la question de savoir si le calcul de l'ajustement au coût de la vie dans le cadre du régime était correct et, par conséquent, si Bell Canada (le « gestionnaire du régime ») avait le droit d'arrondir à la deuxième décimale près l'indice des prix à la consommation (l’« IPC ») dans le calcul des augmentations annuelles du coût de la vie. Cet arrondissement entraînait, pour les participants du régime, une différence de plus de 10 M$ CA pour la première année et il était estimé que cette différence pouvait être plus importante à long terme.

Un employé de longue date du gestionnaire (l’« appelant ») a intenté une action collective au nom d'environ 35 000 retraités qui étaient bénéficiaires du régime. Le différend portait précisément sur la définition d’« indice des rentes » (Pension Index) du régime et sur l’application de cette définition dans le contexte du régime dans son ensemble, notamment au chapitre de la disposition régissant l’ajustement au coût de la vie. En première instance, le gestionnaire du régime avait réussi à faire rejeter l’action collective par voie de jugement sommaire. Comme nous l’avons indiqué dans notre Infolettre sur les régimes de retraite d’octobre 2019, la décision du juge de première instance reposait sur la définition d’indice des rentes et le calcul de l’augmentation de l’indexation annuelle. La Cour d’appel a statué que l’appel devait être autorisé.

Bien que la Cour d'appel se soit rangée du côté du juge de première instance relativement à certaines questions concernant l'interprétation de la définition de l'indice des rentes, elle a déterminé que le juge de première instance avait commis une erreur de fait manifeste et dominante ou une erreur de droit isolable, ou les deux : sa décision ne tenait pas compte de la preuve non contredite qui ne rendait pas la disposition relative à l'ajustement au coût de la vie dépouillée de sens, en totalité ou en partie, contrairement à ses conclusions.

Pour ces motifs, la Cour d’appel a annulé le rejet de l’action par le juge de première instance et a rendu un jugement sommaire en faveur de l’appelant.

Décision de la Cour d’appel de l’Ontario

DROIT DE LA FAMILLE

Kraft v. Kraft, 2020 BCSC 283

M. et Mme Kraft ont été mariés pendant plus de 27 ans. Au cours de cette période, M. Kraft est devenu admissible à des prestations de retraite déterminées en vertu du régime de retraite de son employeur. En 1997, M. Kraft s’est séparé de Mme Kraft et il a commencé à vivre avec Mme Kempenaar. M. Kraft et Mme Kraft ont officiellement divorcé en 2015. Au moment de son départ à la retraite en 2015, M. Kraft cohabitait avec Mme Kempenaar depuis 18 ans. En première instance, le revenu de retraite de M. Kraft a été divisé en parts égales entre lui et Mme Kraft, sujet qui a été abordé dans notre Infolettre sur les régimes de retraite d’août 2018. En appel, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a rejeté l’appel, mais a renvoyé la question des prestations de survivant à la Cour suprême de la Colombie-Britannique pour un nouvel examen.

Pour en arriver à sa décision selon laquelle les prestations de survivant de M. Kraft devraient être partagées en parts égales entre Mme Kempenaar et Mme Kraft si M. Kraft décédait avant elles, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a examiné l’interaction entre la Family Law Act (la « FLA ») de la Colombie-Britannique et la Pension Benefits Standards Act (PBSA) de la Colombie-Britannique.

Les paragraphes 80(1) et (2) de la PBSA stipulent qu’un régime de retraite doit accorder à une personne admissible à titre de conjoint (spouse) au moment où le régime de retraite devient exigible un intérêt de survivant (survivorship interest) d’au moins 60 pour cent. Selon le paragraphe 1(3) de la PBSA, Mme Kempenaar était la conjointe de M. Kraft au moment où le régime de retraite est devenu exigible. Mme Kempenaar profite d’une priorité apparente à un intérêt de survivant aux termes de la PBSA; toutefois, la FLA prévoit des situations où une autre personne pourrait avoir un intérêt dans des prestations de retraite. La Cour suprême de la Colombie-Britannique note que les alinéas 126(2)(b) et (3)(a) de la FLA semblent créer un mécanisme pour déroger au droit présumé du conjoint d’un membre à la date à laquelle le régime de retraite est devenu exigible.

La Cour suprême de la Colombie-Britannique a indiqué que M. Kraft a constitué un régime de retraite alors qu’il était marié à Mme Kraft et à Mme Kempenaar, créant ainsi pour les deux conjointes une réclamation solide à un intérêt de survivant dans le régime de retraite de M. Kraft. La Cour a déterminé que le fait de conclure que Mme Kempenaar est devenue pleinement admissible à la prestation de survivant puisqu’elle était la conjointe de M. Kraft au moment où celui-ci a pris sa retraite ne permettrait pas de reconnaître la contribution de Mme Kraft à cet actif. La Cour a tranché que le paragraphe 126(b) de la FLA visait à corriger des situations où il serait injuste et inéquitable de priver complètement un conjoint rival/une conjointe rivale de son droit à la prestation, compte tenu de sa contribution au mariage et de la capacité du membre de constituer un régime de retraite. Par conséquent, les prestations de survivant ont été divisées en parts égales entre Mme Kraft et Mme Kempenaar.

Décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique

Miaskowski v. MacIntyre, 2020 ONCA 178

Mme MacIntyre et M. Miaskowski (collectivement, les « parties ») se sont séparés à deux reprises pendant leur mariage. Deux ans et demi après leur première séparation, les parties ont conclu un accord de séparation qui comprenait un certain nombre de renonciations, notamment une renonciation de la part de Mme MacIntyre à ses droits dans le régime de retraite de M. Miaskowski. En outre, l’accord de séparation comprenait une clause de réconciliation qui annulait l’accord de séparation si les parties se réconciliaient pendant plus de 90 jours. Cependant, la clause d’annulation comptait une exception, à savoir que « [traduction] tout paiement, toute cession ou tout acte » fait aux termes de l’accord ne serait pas invalidé.

Les parties sont demeurées mariées, se sont ultimement réconciliées quatre ans après avoir signé l’accord de séparation et sont restées ensemble pendant neuf autres années avant de se séparer une seconde fois. La principale question en litige en première instance, et la seule question en litige en appel, était l’étendue du droit de Mme MacIntyre au partage de la valeur du régime de retraite de M. Miaskowski compte tenu des clauses de réconciliation et d’annulation prévues dans l’accord de séparation. Si la renonciation de Mme MacIntyre à toute réclamation au régime de retraite de M. Miaskowski a été annulée lorsque les parties se sont réconciliées pendant plus de 90 jours, alors la valeur du régime de retraite de M. Miaskowski serait calculée en utilisant la date du mariage comme date de départ. D’un autre côté, si la renonciation de Mme MacIntyre à une réclamation au régime de retraite de M. Miaskowski a survécu à la réconciliation de plus de 90 jours des parties, alors la valeur du régime de retraite serait calculée en utilisant la date de la réconciliation comme date de départ.

Selon le juge de première instance, la clause de renonciation précise au régime de retraite n’a pas été annulée par la réconciliation des parties. Le juge de première instance fait référence à l’arrêt Sydor v. Sydor, 178 OAC 155 (l’« arrêt Sydor ») de la Cour d’appel de l’Ontario dans lequel la cour explique la règle de common law selon laquelle un accord de séparation devient nul en cas de réconciliation « [traduction] sous réserve d’une clause précise dans l’accord qui l’emporterait sur la common law ». Dans l’arrêt Sydor, la cour a également déclaré que « [traduction] la renonciation précise à tous les droits dans un bien donné peut être perçue comme la preuve que les parties considèrent l’aliénation de ce bien comme définitive et exécutoire, peu importe ce qui pourrait arriver dans l’avenir ». Le juge de première instance a déterminé que la renonciation de Mme MacIntyre à une réclamation ou à un droit au régime de retraite de M. Miaskowski constituait le genre de « renonciation précise » dont il est question dans l’arrêt Sydor et qu’elle a survécu à la réconciliation des parties.

En infirmant la décision de première instance, la Cour d’appel de l’Ontario a conclu que le juge de première instance a commis des erreurs dans (i) sa conclusion que le paiement d’égalisation versé à Mme MacIntyre aux termes de l’accord de séparation incluait la valeur de sa part du régime de retraite jusqu’à la date de la séparation, et (ii) son interprétation et son application de l’accord de séparation en omettant de donner effet à la clause de réconciliation qui annule l’accord en cas de réconciliation pendant plus de 90 jours. En ce qui concerne la première erreur, la Cour d’appel de l’Ontario a trouvé une preuve claire que le paiement d’égalisation que Mme MacIntyre a reçu était lié à la vente du foyer conjugal et ne comprenait pas la valeur du régime de retraite de M. Miaskowski. Ainsi, il n’y a pas eu de « paiement, cession ou acte » comme le prévoyait la clause d’annulation de l’accord de séparation. La Cour d’appel de l’Ontario a déterminé que la clause d’annulation de la clause de réconciliation, et non l’exception à celle-ci, s’appliquait à la renonciation au régime de retraite. En ce qui concerne la seconde erreur, la Cour d’appel de l’Ontario a jugé que le libellé de la clause d’annulation dans l’accord de séparation indiquait clairement l’intention des parties de retourner à la position où ils étaient avant la séparation en cas de réconciliation de plus de 90 jours. Bien que la clause prévoyait également qu’il n’était pas nécessaire de défaire des cessions ou des transferts qui avaient été réalisés, la Cour d’appel de l’Ontario a tranché qu’aucune cession de la sorte n’a été faite à l’égard du droit de Mme MacIntyre à la valeur du régime de retraite de M. Miaskowski.

Par conséquent, la Cour d’appel de l’Ontario a jugé que la renonciation au droit de Mme MacIntyre au partage du régime de retraite était nulle et que cette dernière avait le droit de recevoir une quote-part du régime de retraite de M. Miaskowski pour la période entre la date du mariage et la date de la seconde séparation.

Décision de la Cour d’appel de l’Ontario

COMPÉTENCE À L’ÉGARD D’UN RÉGIME DE RETRAITE

Canada (Procureur général) c. Northern Inter-Tribal Health Authority Inc., 2020 CFA 63

Peter Ballantyne Cree Nation Health Services Incorporated et Northern Inter-Tribal Health Authority Inc. (collectivement, les « intimées ») étaient des personnes morales sans but lucratif dispensant des services de santé à la Nation crie Peter Ballantyne, aux termes d’ententes sur la santé conclues avec le gouvernement fédéral. Les intimées ont présenté une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale du Canada (la « Cour fédérale ») à l’égard de la décision du Bureau du surintendant des institutions financières (le « BSIF ») selon laquelle les régimes de retraite des intimées n’étaient pas de compétence fédérale et devaient donc être enregistrés au palier provincial; cette demande a été accueillie. La décision de la Cour fédérale a été traitée dans notre Infolettre sur les régimes de retraite – Janvier 2019.

En accueillant l’appel, infirmant ainsi la décision de la Cour fédérale, et rejetant du même coup la demande de contrôle judiciaire des intimées, la Cour d’appel fédérale (la « Cour d’appel ») a jugé que le BSIF avait en fait correctement interprété le paragraphe 4(4) de la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension, qui exige qu’il examine qui a la « compétence législative » pour réglementer l’entreprise d’une entité. La Cour d’appel a également déterminé que le BSIF avait correctement appliqué le critère énoncé dans l’arrêt NIL/TU,O Child and Family Services Society c. B.C. Government and Service Employees' Union, 2010 CSC 45 (l’« arrêt NIL/TU,O »), qui exige que les décideurs examinent « la nature de l’entité, son exploitation et ses activités habituelles » pour voir s’il s’agit d’une entreprise fédérale.

La Cour d’appel a tranché que la Cour fédérale a erré dans son application de l’arrêt NIL/TU,O. Plutôt que de se concentrer sur la question de savoir quel palier de gouvernement avait la compétence législative de réglementer l’entreprise des intimées et plutôt que de suivre rigoureusement l’arrêt NIL/TU,O, la Cour fédérale a dirigé son attention sur les modalités des traités, l’importance et le caractère solennel des traités et l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui reconnaît et confirme les droits prévus par les traités. Ce faisant, la Cour fédérale a omis d’effectuer un examen fonctionnel de la nature de l’entreprise en exploitation des intimées. La Cour d’appel a déclaré que, bien que le gouvernement fédéral puisse s’acquitter de son obligation aux termes des traités en fournissant un financement des soins de santé aux Autochtones, le financement fédéral en soi ne transforme pas une entreprise par ailleurs provinciale en une entreprise fédérale.

Décision de la Cour d’appel fédérale

NÉGOCIATION COLLECTIVE

Teamsters Canada Rail Conference, Division 660 v. Bombardier Transportation - North America, 2020 CanLII 12641 (ON LRB)
 
Cette affaire a été présentée devant la Commission des relations de travail de l’Ontario (la « Commission ») comme une requête aux termes de la Loi de 1995 sur les relations de travail (la « Loi ») alléguant des violations de certains articles de la Loi. Le différend dans cette affaire est né dans le cadre des négociations pour le renouvellement d’une convention collective entre le syndicat, Conférence ferroviaire de Teamsters Canada, Division 660 (le « syndicat ») et l’employeur, Bombardier Transport – Amérique du Nord (l’« employeur »).

Selon le syndicat, la raison pour laquelle les parties n’ont pas finalisé de convention collective est l’inflexibilité de l'employeur. Plus particulièrement, le syndicat a allégué que l’employeur a refusé de communiquer des renseignements sur le régime de retraite qui s’appliquait aux employés de l'unité de négociation (le « régime de retraite ») et qu’il a augmenté les taux des frais d’administration pour les membres. L’employeur a rejeté toutes les allégations selon lesquelles il a agi illégalement et il a demandé que la requête soit rejetée.

Tôt dans le processus de négociation, le syndicat a demandé une copie du contrat intervenu entre le Comité de placement de Bombardier Trust (Canada) et le dépositaire concernant l’administration du régime de retraite (le « contrat relatif au régime de retraite ») afin d’examiner uniquement les dispositions ayant trait aux membres de son unité de négociation. Le syndicat voulait évaluer la transférabilité du régime de retraite et l’augmentation des frais d’administration pour les membres du régime. À ce moment, l’employeur a indiqué qu’il était prêt à discuter des préoccupations du syndicat concernant le régime de retraite. Plusieurs mois plus tard, l’employeur a refusé de fournir une copie du contrat relatif au régime de retraite au syndicat, malgré la suggestion du syndicat que l’employeur caviarde toutes les dispositions ne se rapportant pas à l’unité de négociation. L’employeur a cependant indiqué qu’il était disposé à discuter et a offert d’entendre les questions du comité de négociation du syndicat concernant le régime de retraite, ce que le syndicat a refusé.

En ce qui concerne l’augmentation des frais d’administration, le Commission a noté que le syndicat n’a jamais fait valoir, que ce soit dans le cadre de cette affaire ou pendant le processus de négociation, qu’il avait le droit de voir les renseignements concernant l’augmentation des frais d’administration dans le contrat relatif au régime de retraite au motif que l’augmentation des frais était trop élevée ou déraisonnable. Le syndicat n’a aucunement contesté les frais. Il a simplement voulu voir le contrat relatif au régime de retraite afin d’évaluer la façon dont les frais d’administration étaient calculés, de savoir qui, du dépositaire ou de l’employeur, avait un mot à dire sur les frais et de présenter des suggestions sur la manière dont la valeur des frais pourrait davantage profiter aux membres du régime.

La Commission a conclu que l’employeur avait déployé des efforts constants pour collaborer avec le syndicat dans le processus de négociation afin d’aborder les préoccupations du syndicat concernant le régime de retraite, notamment l’augmentation des frais d’administration. Le syndicat n’a pas profité de l’offre de l’employeur d’examiner des questions particulières à l’unité de négociation et n’a pas élaboré de propositions de discussions avec l’employeur concernant le régime de retraite. La Commission n’a par conséquent pas jugé qu’il y avait eu violation de la Loi à l’égard des questions touchant le régime de retraite.

Décision de la Commission des relations de travail de l’Ontario

AVANTAGES RELATIFS À LA SANTÉ ET AU BIEN-ÊTRE

Hutton v. The Manufacturers Life Insurance Company (Manulife Financial), 2019 ONCA 975

Mme Hutton était à l’emploi de Quinte Healthcare Corporation (« QHC ») et membre du Syndicat des employées et employés de la fonction publique de l’Ontario (le « SEFPO »). QHC et le SEFPO étaient parties à une convention collective régissant les modalités et les conditions de l’emploi de Mme Hutton (la « convention collective »). QHC avait passé un contrat avec La Compagnie d’Assurance-Vie Manufacturers (l’« assureur ») pour offrir des avantages collectifs, notamment une assurance-vie et une assurance-invalidité de longue durée (l’« assurance ILD »), aux employés admissibles. Mme Hutton prétendait qu’elle était invalide en raison des blessures qu’elle a subies dans un accident de voiture et a réclamé l’assurance ILD aux termes de la convention collective. La Cour d’appel de l’Ontario a été saisie pour déterminer si la cour avait compétence sur la réclamation de Mme Hutton contre l’assureur ou si la réclamation était assujettie aux dispositions relatives aux griefs et à l’arbitrage aux termes de la convention collective.

La convention collective prévoyait que les employés admissibles avaient droit à l’assurance ILD en vertu du Hospitals of Ontario Disability Income Plan (le « régime HOODIP ») ou un régime équivalent. La convention collective prévoyait également le recours au processus d’appel de la société d’assurance avant le dépôt d’un grief. L’assureur a initialement approuvé la réclamation de Mme Hutton. Toutefois, à la suite d’un examen de son dossier, Mme Hutton a été informée qu’elle ne remplissait plus les critères d’admissibilité à l’assurance ILD aux termes de la police de l’assureur. Mme Hutton a déposé un grief auprès de QHC selon la procédure de grief énoncée dans la convention collective. Pendant que son grief était en cours, Mme Hutton a également entamé une poursuite contre l’assureur pour, notamment, rupture de contrat, droit à l’assurance ILD et dommages-intérêts punitifs pour « mauvaise foi ». L’assureur a présenté une requête en jugement sommaire pour faire rejeter la réclamation de Mme Hutton au motif que la cour n’avait pas compétence sur la réclamation puisque celle-ci découlait de la convention collective et qu’elle était soumise à l’arbitrage exclusif aux termes de la convention collective.

Le juge saisi de la requête a statué que le droit de Mme Hutton à l’assurance ILD relevait des dispositions relatives aux griefs et à l’arbitrage exclusives de la convention collective et était donc soumis à l’arbitrage. Pour ce faire, le juge saisi de la requête a conclu que le droit de Mme Hutton à l’assurance ILD et l’obligation de QHC de fournir celle-ci étaient issus de la convention collective. La Cour d’appel de l’Ontario a avalisé la décision du juge saisi de la requête et a rejeté l’appel de Mme Hutton en indiquant que la convention collective ne faisait référence qu’au régime HOODIP et prévoyait que les employés auraient droit au niveau de couverture offert par le régime HOODIP. Les obligations de QHC aux termes du régime HOODIP faisaient partie de la convention collective. Ce seul point est suffisant pour conclure que les dispositions relatives aux griefs et à l’arbitrage de la convention collective s’appliquent aux différends portant sur l’assurance ILD.

Décision de la Cour d’appel de l’Ontario