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Section VI : Acquisition d’une entreprise canadienne

Faire affaire au Canada


1. Considérations générales

La question fondamentale à se poser lors d’une acquisition est la suivante : doit‑on acheter des actions ou des actifs? La réponse à cette question dépendra de divers facteurs, dont le moment de l’opération, la facilité de la mise en place et les incidences fiscales de l’acquisition. Un achat d’actions se passe en général plus simplement et rapidement qu’un achat d’actifs, car il permet d’éviter d’avoir à faire face aux problèmes pratiques associés au transfert de certains actifs et à satisfaire l’exigence habituelle d’obtenir le consentement de tierces parties. Un achat d’actions peut également comporter des avantages fiscaux pour le vendeur puisqu’il permet généralement à ce dernier de bénéficier du régime appliqué aux gains en capital à l’égard de tout gain réalisé à la vente des actions, ce qui vient réduire l’impôt total à payer.

En règle générale, une vente d’actifs favorise moins le vendeur, car celui‑ci devra inclure dans son revenu certaines sommes tirées de la vente, notamment la récupération de l’amortissement sur les actifs vendus. En revanche, l’acquisition d’actifs peut présenter certains avantages pour l’acheteur, en particulier lorsqu’il souhaite exclure de l’opération certains éléments de l’entreprise ou de ses dettes, ou augmenter le coût fiscal de biens amortissables.

Dans un cas comme dans l’autre, l’acheteur voudra en savoir plus au sujet de la situation de l’entreprise sous-jacente, du titre de propriété des actifs du vendeur, des ententes contractuelles avec des tiers et de la conformité de l’entreprise aux lois, dont les lois environnementales. L’acheteur voudra se protéger en réalisant un contrôle préalable de l’entreprise du vendeur et en obtenant les déclarations, garanties et engagements appropriés dans le cadre de la convention d’achat, et possiblement en souscrivant une assurance des déclarations et des garanties.

2. Acquisitions d’actions

2.1 - Quelles sont les approbations nécessaires pour une acquisition d’actions d’une société canadienne par un non‑résident?

La réglementation en valeurs mobilières applicable à un achat d’actions dépend de la structure de la société, c’est-à-dire s’il s’agit d’une société ouverte ou fermée (voir le paragraphe 2.4 du chapitre VI, « Existe‑t‑il des règles spéciales s’appliquant à l’acquisition d’actions de sociétés ouvertes? ». Dans le cas de grandes acquisitions, les lois canadiennes sur la concurrence rendent obligatoire l’obtention d’une autorisation préalable (voir le paragraphe 1.4 du chapitre IV, « Réglementation en matière de fusions »). Autrement, l’approbation en vertu de la Loi sur Investissement Canada constitue la principale autorisation pouvant être exigée. Voir l’article 2 du chapitre IV, « Règles générales concernant les investissements étrangers ».

2.2 - Quelles sont les incidences fiscales d’une acquisition d’actions?

Il n’existe pas de droit de timbre ou d’autre taxe ou impôt semblable payable au Canada dans le cas d’une acquisition d’actions. Le vendeur des actions pourrait devoir payer un impôt sur les gains en capital. Afin de s’assurer que les non-résidents du Canada paient l’impôt exigible à l’égard de la vente d’un « bien canadien imposable », qui peut comprendre certaines actions (par exemple, si les actions tirent principalement leur valeur d’un bien immobilier canadien), la Loi de l’impôt sur le revenu exige que l’acheteur d’un bien canadien imposable mène une « enquête sérieuse » et qu’il soit convaincu du statut de résident canadien du vendeur (normalement grâce à des déclarations à cet effet dans la convention d’achat). Le vendeur non résident pourrait devoir fournir à l’acheteur un certificat délivré par les autorités fiscales, qui sera accordé lorsque les arrangements appropriés auront été pris afin de garantir le règlement de toute obligation fiscale. Si le certificat n’est pas fourni, l’acheteur pourrait devoir retenir et remettre aux autorités fiscales 25 % du prix d’achat, que le vendeur ait ou non à payer de l’impôt sur la vente. Les actions inscrites à la cote d’une bourse de valeurs reconnue peuvent constituer un « bien canadien imposable » dans certaines circonstances; toutefois, il n’est pas nécessaire d’obtenir un certificat relatif à la vente de ces actions.

2.3 - Lacheteur peut-il remercier librement de leurs services les administrateurs et dirigeants de la société canadienne acquise?

Les administrateurs peuvent être destitués par voie de résolution des actionnaires, ce qui pourrait permettre à un acheteur non résident de remplacer le conseil d’administration de la société acquise selon ce qu’il juge approprié, sous réserve des obligations en matière de qualifications et de résidence pour les administrateurs mentionnées à l’alinéa 1.2.1 du chapitre III, « Qui est responsable de la société par actions? ».

Les dirigeants et les autres employés de la cible peuvent être congédiés, sous réserve des dispositions prévues dans les lois canadiennes et dans tout contrat de travail ou toute convention collective. Plus précisément, à moins que leur contrat de travail ne précise effectivement leurs droits en cas de cessation d’emploi, selon la common law et le Code civil du Québec, les employés ont droit à un préavis de cessation d’emploi ou à une indemnité tenant lieu de préavis raisonnable s’ils sont licenciés sans motif valable. Selon la durée de service de l’employé, son poste, sa rémunération, son âge et l’offre de postes semblables, l’avis de cessation d’emploi exigé (ou l’indemnité tenant lieu de préavis) peut varier entre un mois et 24 mois, et peut même être plus long dans des circonstances exceptionnelles.

Parmi les conditions types de clôture, l’acheteur pourrait exiger que les membres du conseil et des dirigeants désignés démissionnent de leurs fonctions d’administrateur ou de dirigeant et lui fournissent des quittances à cet égard. Voir le chapitre VIII, « Droit du travail et de l’emploi », qui aborde de manière générale les droits des employés.

2.4 - Existe-t-il des règles spéciales s’appliquant à l’acquisition d’actions de sociétés ouvertes?

L’acquisition d’actions d’une société ouverte pourrait entraîner l’application des exigences relatives aux « offres publiques d’achat » des lois canadiennes sur les sociétés par actions et sur les valeurs mobilières. Au Canada, les règles régissant les offres publiques d’achat sont maintenant harmonisées dans toutes les provinces. Habituellement, les acquisitions de sociétés ouvertes négociées au Canada débutent avec l’envoi par l’initiateur d’une lettre d’entente non exécutoire dans laquelle il se déclare intéressé à acquérir les titres en circulation de la cible et la signature d’une entente de confidentialité et de statu quo entre les parties, suivis de la négociation d’une convention de soutien détaillée. Des exigences supplémentaires peuvent s’appliquer à l’acquisition d’actions d’une société ouverte si des parties liées sont concernées.

2.4.1 - Réglementation des offres publiques d’achat

Pour qu’une acquisition constitue une offre publique d’achat, elle doit viser 20 % des actions avec droit de vote ou des titres « de capitaux propres » émis (essentiellement des actions ordinaires sans droit de vote) de toute catégorie ou série de l’émetteur. Ce seuil s’applique que l’initiateur obtienne ou non le contrôle effectif de la société. Toute acquisition de 10 % ou plus des actions avec droit de vote ou des titres de capitaux propres d’une société (ou des titres convertibles en titres avec droit de vote ou en titres de capitaux propres), suivie de toute acquisition ou cession de 2 % ou plus à l’intérieur de la fourchette de 10 % à 20 %, doit être déclarée en vertu des règles relatives au « système d’alerte » de la législation canadienne sur les valeurs mobilières.

L’initiateur peut déterminer le nombre d’actions pour lesquelles il souhaite faire une offre. Dans le cas d’une offre partielle, la prise de livraison des actions doit se faire de façon proportionnelle. L’offre peut être assortie de certaines conditions (autres que des conditions de « financement »). Il arrive souvent que l’offre d’achat soit subordonnée à l’atteinte d’un nombre minimum d’acceptations, habituellement 662/3 % (le seuil aux fins de l’approbation de certaines opérations commerciales importantes dans la plupart des provinces et des territoires) ou 90 % (le niveau donnant le droit à l’initiateur d’acquérir les actions en circulation restantes). Une obligation de dépôt minimal de 50 % des titres visés par l’offre est imposée (à l’exclusion des titres que détiennent l’initiateur et ses alliés).

À moins de faire l’objet d’une dispense, une offre publique d’achat doit être présentée à tous les actionnaires sous forme de document d’information (comprenant une offre publique d’achat et une note d’information). La note d’information doit contenir certains renseignements prescrits concernant l’offre et les parties, y compris l’actionnariat et les opérations antérieures de l’initiateur et des parties qui lui sont liées relativement aux actions de la cible. Si la société cible compte des actionnaires québécois, ce qui arrive souvent, la note d’information doit également être rédigée en français aux fins de l’envoi aux actionnaires québécois, à moins qu’une dispense de minimis ne s’applique. Elle doit être remise à la société cible et déposée auprès des commissions des valeurs mobilières, ou des autorités similaires, et des bourses compétentes, mais n’est pas assujettie à un examen préalable. L’initiateur peut en général fixer librement le prix de l’offre et verser la contrepartie en espèces ou en titres (ou en une combinaison d’espèces et de titres).

Lorsque des titres de l’initiateur font partie du prix d’achat, la note d’information doit contenir des renseignements semblables à ceux qui figurent dans un prospectus concernant les activités, les résultats financiers et les états financiers pro forma de l’initiateur dans l’hypothèse de la réalisation de l’offre. Pour les sociétés du secteur des ressources, des rapports techniques sur les terrains ou les ressources pétrolières et gazières de l’initiateur peuvent être exigés. L’émission des titres fera de l’initiateur un « émetteur assujetti », assujettissant celui‑ci à certaines obligations d’information courantes.

Les administrateurs de la société cible doivent remettre aux actionnaires leur propre circulaire en réponse à l’offre. Il existe certaines règles d’entreprise et politiques des commissions des valeurs mobilières qui influent sur la capacité de la société cible de prendre des mesures de défense en réponse à une offre. Une offre assujettie à l’ensemble de la réglementation en vertu de la législation provinciale doit être conforme à certaines règles relatives aux délais et à d’autres règles de procédure, y compris une période d’offre minimale obligatoire. La période d’offre minimale est de 105 jours, sauf dans certaines circonstances si le conseil de la cible décide d’abréger cette durée (le délai de dépôt abrégé doit être d’au moins 35 jours) ou si la cible réalise certaines opérations de remplacement en réponse à l’offre (auquel cas le délai minimal de dépôt est de 35 jours).

2.4.2 - Offres publiques d’achat dispensées

Dans certaines circonstances, une société peut réclamer une dispense des règles juridiques qui régissent les offres publiques d’achat. Tel qu’il est indiqué ci‑dessus, les achats de sociétés fermées font généralement l’objet d’une telle dispense.

La dispense pour « contrat de gré à gré » constitue l’une des plus importantes dispenses applicables aux sociétés ouvertes. On peut réaliser une acquisition au moyen d’un contrat de gré à gré conclu avec un petit nombre de vendeurs sans se voir assujetti aux règles relatives aux offres publiques d’achat, sinon il faudra présenter l’offre à l’ensemble des actionnaires. Toutefois, les règles prévoient une dispense pour ce type d’acquisition uniquement si un maximum de cinq personnes au total (y compris les personnes situées à l’extérieur du Canada) y ont pris part et que le prix d’achat (y compris les frais de courtage et les commissions) n’a pas excédé 115 % du cours de clôture moyen des actions pendant les 20 jours précédant la date de l’offre.

2.4.3 - Arrangements

Les acquisitions amicales de sociétés ouvertes, soit les acquisitions effectuées au moyen d’un plan d’arrangement, sont maintenant assez courantes au Canada. Un arrangement constitue une opération approuvée par les tribunaux, régie par les lois sur les sociétés, qui exige l’approbation des actionnaires (en général dans une proportion de 662/3 %) des sociétés visées. Les parties concluent une convention d’arrangement énonçant les modalités du regroupement, après quoi le tribunal reçoit une demande d’approbation du processus. L’ordonnance du tribunal exigera la tenue d’assemblées des actionnaires et précisera les seuils d’approbation ainsi que les droits à la dissidence (dans la plupart des cas). Les actionnaires recevront une circulaire détaillée comprenant sensiblement la même information que celle figurant dans une note d’information relative à une offre publique d’achat.

Les arrangements comportent de nombreux avantages. Ils peuvent, notamment : faciliter les opérations visant des titres multiples (en particulier, les instruments convertibles); prévoir l’acquisition de la totalité de la société cible sans devoir procéder à une offre complémentaire ni à une opération d’acquisition ultérieure; et si les titres doivent être offerts aux actionnaires de la société cible, fournir une dispense en vertu des lois américaines sur les valeurs mobilières relativement à l’exigence de dépôt d’une déclaration d’enregistrement. En revanche, les arrangements laissent la société cible contrôler le processus et peuvent permettre aux parties intéressées d’intervenir dans les procédures judiciaires (quoique cela se produise rarement au Canada).

2.4.4 - Fusions

Les acquisitions sont parfois réalisées sous forme de « fusions ». Le concept d’une fusion ressemble à celui prévu en droit américain; toutefois, la société issue de la fusion est considérée comme étant la société remplaçante des entités visées par la fusion, et recueille leurs actifs et passifs. Tout comme les offres publiques d’achat négociées, les fusions commencent habituellement par la signature d’une lettre d’intention non exécutoire en provenance de l’initiateur, dans laquelle il fait part de son intérêt à fusionner avec la société cible, et d’une entente de statu quo et de confidentialité entre les parties, suivie de la négociation d’une convention de fusion détaillée.

En règle générale, tous les porteurs de titres dont les droits sont touchés par une fusion proposée pourront exercer leurs droits de vote à l’égard de l’opération. Les seuils d’approbation correspondent habituellement à 662/3 % des titres représentés par catégorie à l’assemblée des porteurs de titres. L’information fournie aux porteurs de titres pouvant exercer leurs droits de vote à l’égard de la fusion doit être suffisante pour leur permettre de se former un jugement éclairé afin de déterminer s’ils appuieront la proposition ou voteront contre celle‑ci. Au Canada, les circulaires de sollicitation de procurations ne sont pas assujetties à un examen réglementaire. Les porteurs de titres peuvent faire valoir leur dissidence à l’égard d’une opération de fusion et recevoir la juste valeur de leurs titres. Sous réserve des approbations des autorités de réglementation, le processus de fusion prend habituellement de 60 à 90 jours. En tenant compte de la disponibilité de l’information financière et du temps de préparation de celle‑ci, l’élaboration des documents relatifs à l’assemblée des porteurs de titres peut prendre de trois à quatre semaines.

Une fusion prévue par la loi, réalisée dans le cadre d’une opération d’acquisition, procure à l’acquéreur la certitude qu’il obtiendra la totalité des actions de la cible. Cependant, ce type d’opération nécessite souvent plus de temps que si elle était effectuée dans le cadre d’une offre publique d’achat. Les fusions sont plus rares que les arrangements, car si le temps et les documents exigés pour les deux types d’opérations sont essentiellement les mêmes, les fusions n’offrent pas la même flexibilité qu’un arrangement en matière de structuration ni l’avantage d’une décision du tribunal quant au caractère équitable de l’opération.

2.5 - En cas d’acquisition forcée, quels sont les droits des porteurs minoritaires après une offre publique d’achat réussie?

Un initiateur qui acquiert la quasi-totalité d’une catégorie d’actions d’une société (en général, 90 % des actions de la catégorie qui n’étaient pas détenues par l’initiateur et les personnes ayant des liens avec lui au moment de la présentation de l’offre) peut généralement acheter la participation restante des actionnaires de la catégorie au prix d’offre ou, si l’actionnaire s’y oppose, à sa « juste valeur » établie par le tribunal. Si un initiateur entend exercer son droit d’effectuer une acquisition forcée, il doit déclarer son intention dans la note d’information et suivre certaines étapes dans un délai prescrit (généralement 180 jours) après l’offre.

Il existe d’autres moyens d’éliminer les participations minoritaires d’une société, comme une fusion, un arrangement ou un regroupement faisant en sorte que l’actionnaire perd sa participation dans l’entreprise. Les lois sur les valeurs mobilières et sur les sociétés par actions prévoient la protection des actionnaires minoritaires dans certaines circonstances, mais si un initiateur acquiert 662/3 % des actions aux termes d’une offre, il pourra normalement éliminer les participations minoritaires.
 

3. Acquisitions d’actifs

3.1 - Quelles sont les approbations nécessaires en cas d’achat d’actifs d’une société canadienne par un non‑résident ou par sa filiale canadienne?

Les mécanismes d’examen de la Loi sur Investissement Canada, dont il est question à l’article 2 du chapitre IV, « Règles générales concernant les investissements étrangers », s’appliquent également à l’achat « de la totalité ou de la quasi‑totalité des actifs d’exploitation de [l’entreprise canadienne] ». Le paragraphe 1.4 du chapitre IV, « Réglementation en matière de fusions », traite des lois sur la concurrence pouvant s’appliquer à une acquisition d’actifs.

Outre les approbations prévues par la loi, le consentement des locateurs, des propriétaires d’équipement, des créanciers et des actionnaires peut être nécessaire. En vertu de la plupart des lois canadiennes sur les sociétés par actions, si une vente comporte la cession de la totalité ou de la quasi-totalité des actifs d’une société, les actionnaires doivent approuver l’opération par voie d’une résolution spéciale.

3.2 - Quelles sont les incidences fiscales d’un achat d’actif

Deux différents types de règles fiscales doivent faire l’objet d’un examen dans ce Deux différents types de règles fiscales doivent faire l’objet d’un examen dans ce contexte : 1) l’assujettissement à l’impôt sur le revenu, et 2) l’application des taxes de vente fédérale et provinciale. S’il s’agit d’un bien immobilier, des droits de cession immobilière peuvent aussi être exigibles.

3.2.1 - Questions liées à l’impôt sur le revenu canadien

Les immobilisations utilisées par un vendeur dans le cadre de l’exploitation d’une entreprise canadienne constitueront généralement un « bien canadien imposable ». Tel qu’il est mentionné au chapitre VII, « Fiscalité », l’acheteur devrait se protéger contre l’assujettissement à l’impôt possible en procédant à des « enquêtes sérieuses », afin de confirmer le statut de résident canadien du vendeur. À cette fin, le contrat d’achat comprendra habituellement une déclaration appropriée. Un certificat des autorités fiscales pourrait être exigé dans le cas d’un vendeur non-résident.

La répartition du prix d’achat entre les différents actifs acquis donnera également lieu à des incidences fiscales canadiennes et fera l’objet de négociations entre les parties, qui devraient s’entendre pour produire leur déclaration de revenus conformément à la répartition, afin de réduire le risque que les autorités fiscales canadiennes répartissent le prix d’achat d’une façon qui pourrait désavantager les parties.

Un acheteur ne peut, dans le cadre d’une acquisition d’actifs, se prévaloir des pertes et des crédits fiscaux accumulés relativement à une entreprise.

3.2.2 - Taxes de vente

Les gouvernements fédéral et provinciaux perçoivent des taxes de vente. Trois provinces (soit la Colombie-Britannique, le Manitoba et la Saskatchewan) perçoivent des taxes sur les ventes au détail, tandis que le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec perçoivent des taxes sur la valeur ajoutée au moyen de la taxe sur les produits et services (« TPS »)/taxe de vente harmonisée (« TVH ») et de la taxe de vente du Québec (« TVQ »), respectivement. Voir le paragraphe 6.1 du chapitre VII, « Taxe de vente et taxe d’accise fédérales » pour un examen plus approfondi de la TPS et de la TVH.

Dans le cadre d’une vente des actifs d’une entreprise, il est possible de choisir d’éviter l’application de la TPS/TVH et de la TVQ à l’opération. Un tel choix peut être offert dans le cas de la vente de la totalité ou de la quasi-totalité des actifs raisonnablement jugés nécessaires à l’exploitation d’une entreprise ou d’une partie de celle-ci. Lorsque le choix s’applique, la vente des actifs d’une entreprise peut échapper à la TPS/TVH et à la TVQ.

Deux conditions essentielles doivent être remplies pour pouvoir se prévaloir de ce choix. Premièrement, les actifs vendus doivent constituer une « entreprise ou une partie d’entreprise » établie, exploitée ou acquise par le vendeur. Deuxièmement, l’acquéreur doit faire l’acquisition d’au moins 90 % des actifs raisonnablement nécessaires pour exploiter l’entreprise. Une entente entre l’acquéreur et le vendeur portant sur des questions que l’on trouve habituellement dans les conventions d’acquisition, telles que la vente de la survaleur, ou l’achalandage, et de la propriété intellectuelle, les relations avec les employés, en plus de la vente d’équipement et de stocks, serait admissible et permettrait aux parties de choisir d’éviter l’application de la TPS/TVH et de la TVQ.

L’assujettissement à la taxe de vente provinciale, s’il y a lieu, dépend de la province dans laquelle se trouvent les actifs. Par exemple, le taux actuel des taxes perçues sur les transferts imposables de biens meubles corporels (y compris les logiciels) et de certains services s’établit à 7 % au Manitoba et en Colombie-Britannique, tandis qu’il s’établit à 6 % en Saskatchewan. Il existe une vaste gamme de dispenses, en particulier pour les transferts de stocks, pourvu que les biens soient achetés aux fins de revente ou d’une étape ultérieure de fabrication. Si l’acheteur acquiert des actifs d’une entreprise, il peut également se voir assujetti à la taxe de vente accumulée du vendeur, à moins qu’il n’obtienne des certificats de décharge auprès des autorités responsables de la taxe de vente au détail indiquant que toutes les taxes ont été perçues et acquittées à ce jour.  

3.3 - Quelles sont les obligations de l’acheteur à l’égard de tiers créanciers?

Le droit canadien protège les créanciers d’une entreprise, ce qui pourrait influer sur une acquisition d’actifs. Tout d’abord, les créanciers dont la sûreté grève un bien immeuble ou meuble continueront d’avoir priorité à l’égard des actifs visés à l’encontre de l’acheteur. Certaines lois régissent l’enregistrement des sûretés au Canada, et des recherches peuvent être effectuées pour vérifier l’existence de telles sûretés. À moins que l’acheteur ne fasse l’acquisition des actifs sous réserve des sûretés existantes, ce qui peut être le cas à l’égard des biens immeubles et des éléments importants d’un bien meuble financé, le vendeur devrait acquitter ses obligations et accorder mainlevée de la sûreté au moment de l’acquisition. Si des ententes de financement applicables doivent demeurer en vigueur après la clôture, une vérification diligente devrait être effectuée à l’égard des modalités commerciales et juridiques de ces ententes, y compris à l’égard de tout consentement qui pourrait être requis concernant un changement de contrôle comme condition préalable à l’acquisition.

4. Questions relatives aux employés

Les droits des employés dans le cas d’une acquisition varient en fonction de la nature de celle-ci ainsi que des lois relatives aux relations de travail et à l’emploi du territoire qui s’appliquent aux employés. Prenons en guise d’exemple les règles ontariennes.

À moins d’indication contraire dans un contrat de travail, on n’observera aucun changement de la relation de travail dans le cas d’une acquisition d’actions, puisque l’acheteur deviendra pour ainsi dire l’employeur aux fins de l’emploi. Par conséquent, aucune cessation d’emploi ne découlera d’un achat d’actions, et les contrats de travail existants resteront en vigueur, sauf ceux dont les dispositions prévoient le contraire.

Dans le cas d’un achat d’actifs, selon la common law, la vente donnera souvent lieu à une cessation d’emploi pour le personnel de la société qui effectue la vente. Cela signifie que si l’acheteur ne fait pas d’offre d’emploi à un employé ou que ce dernier choisit de refuser une telle offre, la vente d’actifs occasionnera dans bien des cas, lors de sa réalisation, le congédiement déguisé des employés du vendeur. En pratique, lorsque les actifs du vendeur auront été vendus, les employés n’auront plus de travail à effectuer. Dans la plupart des situations, le vendeur mettra bel et bien fin à l’emploi des employés qui ne reçoivent pas d’offre d’emploi de l’acheteur ou qui refusent de telles offres. Afin de minimiser les frais liés à la cessation, le vendeur pourrait insister pour que certaines dispositions de la convention d’achat prévoient que l’acheteur soit tenu d’offrir un emploi à tous les employés visés à des conditions qui sont essentiellement similaires à leurs conditions d’emploi actuelles de manière à inciter les employés à accepter ces offres. Si l’employé n’accepte pas une telle offre d’emploi, le manquement de l’employé à son obligation en common law d’atténuer les dommages-intérêts pour congédiement injustifié en acceptant l’offre faite par l’acheteur peut également réduire les frais du vendeur liés à la cessation d’emploi.

Pour les entreprises réglementées par les lois provinciales de l’Ontario, lorsque certains employés sont syndiqués, la Loi de 1995 sur les relations de travail prévoit que l’acheteur d’une « entreprise » acquise assume le rôle d’employeur aux fins des droits de négociation du syndicat et de toute convention collective. Cette disposition a pour effet d’obliger l’acheteur à respecter les exigences de la convention collective et à continuer de reconnaître les droits de négociation de l’agent de négociation collective. Le terme « entreprise » s’entend d’une ou de plusieurs parties de l’entreprise et comprend le transfert de toute partie d’une entreprise en tant qu’entreprise en exploitation.

En outre, la Loi de 2000 sur les normes d’emploi (« LNE ») prévoit certaines obligations minimales à l’égard des employés syndiqués et non syndiqués. Les conditions d’emploi plus avantageuses, qu’elles soient expresses (par exemple, dans une convention collective ou un contrat de travail écrit) ou implicites (par exemple, selon les règles de common law relatives au congédiement injustifié), auront préséance sur les exigences minimales prévues par les lois sur les normes du travail.

Pour empêcher que les sociétés achètent et vendent des actifs afin d’éviter leurs obligations liées à l’emploi, la LNE prévoit que les années de service antérieures des employés d’un vendeur, embauchés par l’acheteur par suite d’une vente d’actifs, sont reportées aux fins du calcul subséquent des années de service de l’employé ou de la durée de son emploi, notamment pour établir le droit à une indemnité de cessation d’emploi ou à un préavis de licenciement de la part de l’acheteur. Toutefois, cela ne s’applique pas aux employés qui sont embauchés par l’acheteur plus de 13 semaines après le dernier jour d’emploi de l’employé auprès du vendeur ou la date de vente, selon la première de ces éventualités. La LNE prévoit également certaines exigences relatives à la période de préavis minimale et aux indemnités de cessation d’emploi qui s’appliquent lors d’un licenciement, notamment des exigences précises en cas de licenciement collectif de 50 employés ou plus au cours d’une période de quatre semaines ou moins, sous réserve de certaines exceptions. Les licenciements collectifs obligent aussi l’employeur à aviser le directeur des normes d’emploi. Les employés qui comptent cinq années de service ou plus au moment de leur licenciement ont droit à une indemnité de cessation d’emploi si la masse salariale globale de leur employeur est d’au moins 2,5 M$ CA ou si la cessation d’emploi résulte d’une interruption permanente de tout ou partie de l’entreprise dans le cadre de laquelle il est mis fin à l’emploi de 50 employés ou plus au cours d’une période de six mois ou moins. Dans le cas de cessations d’emploi avant le transfert de l’entreprise, le vendeur, à titre d’employeur qui met fin à l’emploi, assumera les frais liés à la cessation d’emploi. Voir l’alinéa 1.1.1 du chapitre VIII, « Cessation d’emploi ». Les autres provinces et les territoires canadiens ont chacun leur propre loi sur les normes d’emploi, qui renferme des règles spécifiques à suivre dans le contexte d’une acquisition.