Le 6 juin 2025, la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (la « CVMO ») a publié un projet de modification (disponible uniquement en anglais) visant le Règlement 48-501 de la CVMO – Négociations pendant les distributions, les offres formelles et les transactions d’échange d’actions (le « Règlement 48-501 ») (le « projet de modification »). Si le projet de modification est adopté en sa forme proposée, il serait interdit à toute personne physique ou morale ayant vendu à découvert un titre au cours des cinq jours ouvrables précédant la fixation du prix d’un placement au moyen d’un prospectus ou d’un placement privé de la même catégorie de titres vendus à découvert de participer au placement en question, à moins qu’une exemption ne s’applique.
Dans l’Avis du personnel de la CVMO (l’« Avis ») décrivant le projet de modification (lequel vise à aligner les règles canadiennes sur les règles correspondantes des États-Unis, notamment la Rule 105 du Regulation M pris en application de la Securities Exchange Act of 1934 des États-Unis), il est indiqué que les modifications proposées se fondent sur le rapport final du Groupe de travail sur la modernisation relative aux marchés financiers du ministre des Finances de l’Ontario, publié en 2021. Ce rapport mentionne notamment ce qui suit : 1) les ventes à découvert dans le cadre d’émissions par voie de prospectus et de placements privés, et plus particulièrement les achats préarrangés avec des fonds spéculatifs qui vendent à découvert des actions avant que la vente soit annoncée, font en sorte qu’il est plus difficile de fixer les prix et d’exécuter les placements par voie de prospectus; 2) il serait préférable d’adopter une exigence qui n’oblige pas les organismes de réglementation à prouver l’intention; et 3) une telle exigence serait préférable à des règles contre la manipulation du marché et les délits d’initié (ces conduites étant difficiles à prouver du fait que la loi exige que soit démontrée l’intention ou la connaissance de la partie concernée relativement à la conduite en question) dans le contexte des ventes à découvert effectuées avant un placement.
Bien que l’Avis n’en fasse pas mention, il y a lieu de croire que le projet de modification se fonderait également sur la décision rendue récemment par le Tribunal des marchés financiers de l’Ontario (le « Tribunal ») dans l’affaire Cormark Securities Inc. (Re) (l’« affaire Cormark ») laquelle décision confirme le caractère approprié des opérations de couverture triangulaires (soit un type d’opération que bon nombre de participants du marché considéraient interdit). Dans sa décision, le Tribunal a statué que la vente de titres de capitaux propres librement négociables d’un émetteur à capital ouvert qui ont été empruntés auprès d’un initié de l’émetteur, sont vendus sur le marché par un participant du marché non inscrit et garantis uniquement par le même nombre et la même catégorie de titres achetés concomitamment auprès de la société ouverte dans le cadre d’un placement privé, 1) ne constituait pas un placement indirect de titres auprès du public, effectué sans prospectus; et 2) ne relevait pas de la compétence du Tribunal en matière d’intérêt public.
La décision dans l’affaire Cormark diverge considérablement de la jurisprudence américaine et des lignes directrices de la Securities and Exchange Commission des États-Unis sur les arrangements commerciaux visant à transformer des titres assujettis à des restrictions de revente en titres librement négociables. Des participants du marché ont fait remarquer que cette décision pourrait entraîner au Canada une hausse de l’adoption de structures de placements de titres que d’aucuns pouvaient considérer inacceptables auparavant au chapitre des risques liés à la réglementation.
Le projet de modification propose l’ajout d’une nouvelle section au Règlement 48-101 qui prévoit ce qui suit :
[TRADUCTION] « Une personne physique ou morale ne peut acheter, directement ou indirectement, un titre assujetti à des restrictions de revente qui fait l’objet d’une vente dans le cadre d’un placement pour une contrepartie en espèces si ladite personne physique ou morale a effectué une vente à découvert d’un titre appartenant à la même catégorie que celle du titre assujetti à des restrictions de revente durant la période d’interdiction des ventes à découvert. »
Un « titre assujetti à des restrictions de revente » (short sale restricted security) se veut un titre de capitaux propres autre qu’une part d’un fonds négocié en bourse.
La « période d’interdiction des ventes à découvert » (short sale restricted period) correspond à la période commençant cinq jours ouvrables avant la fixation du prix d’un placement et se terminant à la date de la fixation du prix de ce dernier.
Des exemptions à l’interdiction générale seraient prévues pour ce qui suit :
- Les achats de titres assujettis à des restrictions de revente lorsqu’il s’agit d’un placement au cours du marché;
- Les achats de titres à la conversion ou à l’échange de titres convertibles ou échangeables conformément à l’article 2.42 [Conversion, échange ou exercice] du Règlement 45-106 sur les dispenses de prospectus;
- Lorsque le vendeur à découvert achète, dans le cadre d’opérations sur le marché libre réalisées de bonne foi, une quantité correspondant à non moins que la totalité des titres vendus à découvert au plus tard le jour ouvrable précédant la fixation du prix du placement.
Le projet de modification prévoit qu’il serait interdit à un vendeur à découvert d’acheter des titres dans le cadre d’un placement même si 1) le vendeur à découvert n’avait aucune connaissance préalable du placement; 2) le placement ne constituait pas un « fait important » ou un « changement important » concernant l’émetteur; et 3) les ventes à découvert n’ont eu aucune incidence sur le cours des titres vendus.
Dans l’Avis, la CVMO sollicite des commentaires généraux auprès des participants du marché au sujet du projet de modification, ainsi qu’à l’égard d’une liste de questions précises. La période de consultation prend fin le 3 septembre 2025.
Pour en savoir davantage, communiquez avec l’auteur du présent bulletin ou un autre membre du groupe Marchés des capitaux.
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