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Le haut dirigeant d’une société minière trouvé coupable d’infractions environnementales

Par Tony Crossman, Rochelle Collette et Nicholas Tollefson
18 août 2023

Introduction

Le 7 juillet 2023, la Cour provinciale de la Colombie-Britannique (la « Cour ») a déterminé que le président et chef de la direction d’une société minière était coupable de plusieurs infractions environnementales découlant du rejet de déchets produits par les activités minières de la société à Banks Island, en Colombie-Britannique. Cette décision peut servir à la fois de rappel et de leçon aux administrateurs, dirigeants et employés, étant tous susceptibles d’engager personnellement leur responsabilité à l’égard de la conformité de leur société aux lois environnementales.

En matière d’infractions environnementales, comme un déversement ou un non-respect des normes réglementaires applicables, la culpabilité est habituellement attribuée à la société concernée. Les administrateurs ou les dirigeants d’une société sont rarement tenus principalement responsables d’une violation des lois environnementales parce que les dommages à l’environnement résultent généralement de problèmes systémiques associés à la façon dont la société exerce ses activités, plutôt que de la conduite d’une personne en particulier. Les organismes de réglementation portent rarement des accusations contre les employés qui ne font qu’exécuter les tâches reliées à leur emploi. Cependant, dans certaines circonstances, des administrateurs, des dirigeants et des employés peuvent être tenus personnellement responsables d’infractions environnementales.

La décision

Dans l’affaire R. v. Mossman and Meckert (l’« affaire Mossman »), la Cour a déclaré que M. Mossman était coupable d’avoir omis de se conformer à un permis pour le rejet de déchets détenu par Banks Island Gold Ltd. (« BIG ») et d’avoir violé le règlement intitulé Metal and Diamond Mine Effluent Regulations (le « Règlement »). La Cour a déterminé que BIG avait rejeté des eaux contenant du zinc et des matières totales en suspension dont les quantités dépassaient les seuils établis dans le permis et le Règlement.

M. Mossman était alors le président et chef de la direction de BIG ainsi que le directeur de la mine Yellow Giant Mine de celle-ci (la « mine »). La Cour a accepté l’argument selon lequel M. Mossman était incontestablement l’âme dirigeante clé de BIG à la mine et qu’il était la personne qui pouvait contrôler ce que BIG faisait et ne faisait pas. M. Mossman avait soumis les demandes de permis de BIG pour la mine et agissait comme personne-ressource de la société auprès des organismes de réglementation.

La Couronne a allégué que M. Mossman (et un autre dirigeant) avait commis des infractions environnementales en lien avec l’élimination de déchets provenant de la mine par BIG. Ces infractions tombaient dans quatre catégories générales, soit :

  1. le défaut de signaler des déversements environnementaux;

  2. le rejet de déchets miniers dans l’environnement;

  3. la construction ou l’exploitation d’installations non autorisées dans un cours d’eau ou à proximité de celui-ci;

  4. le rejet de matières selon des quantités dépassant les seuils autorisés.

La Cour a déterminé la non-culpabilité de M. Mossman à l’égard des trois premières catégories d’infraction. Toutefois, elle a trouvé celui-ci coupable relativement au rejet de matières selon des quantités dépassant les limites autorisées dans le permis pour l’élimination de déchets et le Règlement. La Cour a expliqué que M. Mossman avait la responsabilité de s’assurer que BIG effectuait une surveillance environnementale et respectait les modalités de ses permis. En outre, la Cour a souligné qu’au bout du compte, la responsabilité relève de la haute direction.

La Cour s’est montrée particulièrement critique à l’égard du fait que M. Mossman avait laissé BIG poursuivre ses activités minières et rejeter des déchets de la mine pendant plusieurs mois alors que la composition des déchets rejetés ne faisait l’objet d’aucun contrôle. En effet, BIG ayant omis de régler une facture de laboratoire en raison de problèmes liés à son fonds de roulement, le laboratoire en question avait décidé de ne pas remettre à celle-ci les résultats pertinents des analyses relatives aux déchets tant que la facture n’aurait pas été payée. Selon la Cour, M. Mossman avait alors le devoir de s’assurer que BIG cesse ses activités jusqu’à ce qu’il puisse vérifier si les rejets étaient conformes aux quantités autorisées. Or, parce qu’il avait permis la poursuite des activités, M. Mossman avait assumé le risque que les déchets dépassent les quantités autorisées (ce qui était le cas).

La Cour a également souligné que rien ne pouvait démontrer que M. Mossman avait fait preuve de diligence raisonnable, ce qui laissait entendre que celui-ci n’avait pris aucune mesure raisonnable pour prévenir le dépassement éventuel des quantités autorisées.

Leçons à tirer

La condamnation de M. Mossman sert de mise en garde à l’intention des dirigeants de sociétés ayant des obligations de conformité environnementale. La décision met particulièrement en lumière les points suivants :

  • Bien que, le plus souvent, c’est la société qui sera tenue principalement responsable des infractions environnementales, les administrateurs et les dirigeants peuvent également engager leur responsabilité à l’égard des manquements de la société à ses obligations environnementales. En général, la question fondamentale permettant d’établir la responsabilité d’un administrateur ou d’un dirigeant consiste à déterminer si celui-ci assurait la direction et le contrôle de l’entreprise ou de la conduite ayant donné lieu à l’infraction. Au Canada, certaines lois environnementales imposent aux administrateurs et aux dirigeants l’obligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour assurer la conformité à la réglementation applicable ou pour prévenir la commission d’une infraction.

  • Les administrateurs, les dirigeants et les membres de la haute direction ont la responsabilité de s’assurer que des systèmes adéquats sont en place pour gérer et contrôler la conformité d’une société à ses obligations environnementales. Ces systèmes doivent être conçus pour éviter que des problèmes prévisibles surviennent. Dans l’affaire Mossman, la Cour a déterminé que le fait que le laboratoire refuse de transmettre les résultats des analyses parce que BIG n’avait pas réglé les factures que celui-ci lui avait soumises constituait un événement prévisible que M. Mossman aurait dû prévoir et prévenir.

  • Les administrateurs, les dirigeants et les membres de l’équipe de haute direction doivent s’assurer que la société dispose de politiques, de pratiques et de procédures robustes en matière environnementale assurant que les incidents environnementaux sont signalés et traités efficacement. Selon le secteur, il pourra notamment s’agir de désigner clairement un délégué responsable de la conformité aux obligations environnementales.

  • Les administrateurs, les dirigeants et les membres de l’équipe de haute direction doivent agir lorsque des cas de non-conformité leur sont signalés et veiller à ce que leurs instructions soient suivies. Les personnes à la tête d’une société qui ignorent les signalements ou les conseils de leurs gestionnaires des questions environnementales pourraient engager leur responsabilité en cas de non-conformité.

  • Les administrateurs, les dirigeants et les membres de l’équipe de haute direction doivent également agir lorsqu’ils apprennent que des mesures de gestion et de contrôle ont échoué. Dans l’affaire Mossman, la Cour a noté que M. Mossman aurait dû ordonner à BIG de cesser ses activités jusqu’à ce que les mesures de contrôle adéquates aient été rétablies.

Pour en savoir davantage, veuillez communiquer avec :

Charles Kazaz             +1-514-982-4002
Tony Crossman          +1-604-631-3333
Rochelle Collette        +1-604-631-3379
Nicholas Tollefson      +1-604-631-3316

ou un autre membre de notre groupe Environnement.