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Zone de libre-échange continentale africaine : perspectives prometteuses à l’horizon

Par Fabien Lanteri-Massa et Youssef Kabbaj (étudiant en droit)
19 juin 2019

Après avoir été ratifié par 22 États africains, l’Accord établissant la zone de libre-échange continentale africaine (l’« Accord sur la ZLECAf »), qui vise à établir la zone de libre-échange continentale africaine (la « ZLECAf »), est entré en vigueur le 30 mai 2019. Ayant été ratifié par le nombre minimum d’États requis, soit 22, l’Accord sur la ZLECAf peut maintenant être mis en œuvre et ainsi permettre le commerce de marchandises et de services pratiquement sans aucune restriction. L’Accord sur la ZLECAf compte 30 autres signataires qui ne l’ont pas encore ratifié, ce qui porte à 52 le nombre d’États membres sur un total de 55 États africains.

Le 21 mars 2018, à Kigali, 44 États africains ont signé un accord portant création de la ZLECAf. Maintenant en vigueur, l’Accord sur la ZLECAf est considéré comme le plus important accord de libre-échange depuis la création de l’Organisation mondiale du commerce et démontre clairement la tendance actuelle vers l’intégration économique. En effet, si l’ensemble des 55 États africains devaient ratifier l’Accord sur la ZLECAf, cela représenterait 1,2 milliard de personnes et des économies combinées de plus de 2,5 T$ CA.

L’Accord sur la ZLECAf vise notamment à créer un marché africain unique libéralisé pour les marchandises et les services, facilité par la circulation de capitaux et de personnes afin de stimuler le commerce intra-africain en éliminant les barrières au commerce, comme les tarifs douaniers et les quotas d’importation. Il vise également à créer une union douanière continentale, à promouvoir le développement industriel et à renforcer la compétitivité des économies des États parties aux niveaux continental et mondial. Pour y parvenir, l’Accord sur la ZLECAf exige l’élimination de 90 % des tarifs douaniers d’ici 2024, les 10 % restants, soit des tarifs douaniers sur certaines marchandises et certains services « sensibles », devant être progressivement supprimés d’ici 2029. On estime qu’en 2022, le commerce intra-africain aura augmenté de plus de 50 % ou d’environ 35 G$ CA à la suite de ce changement de politique économique continentale. Du même coup, cela devrait entraîner des gains de bien-être de l’ordre d’environ 3,6 G$ CA pour les États africains, générés par une production accrue et la disponibilité de marchandises plus abordables.

Jusqu’à présent l’Accord sur la ZLECAf contient trois Protocoles :

1.            le Protocole sur le commerce des marchandises;

2.            le Protocole sur le commerce des services;

3.            le Protocole sur les Règles et procédures relatives au règlement des différends.

Le Protocole sur le commerce des marchandises énonce les obligations générales qui incombent aux États membres relativement au principe du traitement de la nation la plus favorisée, qui interdit aux membres d’établir une discrimination entre les marchandises des uns et des autres, ainsi qu’à l’égard du principe du traitement national, qui interdit aux membres d’établir une discrimination entre les marchandises domestiques et les marchandises importées. Il prévoit également l’élimination progressive des tarifs douaniers et des mesures correctives commerciales, comme les mesures antidumping, les mesures compensatoires et les mesures de sauvegarde préférentielles.  

Le Protocole sur le commerce des services énonce les obligations des membres quant à la reconnaissance mutuelle continentale des normes nationales et à l’établissement de règlements nationaux touchant le commerce des services, les monopoles et les fournisseurs exclusifs de services. 

Le Protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends établit l’Organe de règlement des différends, ses procédures, ses pouvoirs et son autorité afin de créer des groupes spéciaux de règlement des différends et un organe d’appel.

L’Accord sur la ZLECAf ne remplace pas automatiquement d’autres accords commerciaux régionaux sur le continent, comme les accords établissant la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (la « CEDEAO »), la Communauté d’Afrique de l’Est (la « CAE »), la Communauté de développement de l’Afrique australe (la « SADC ») ou le Marché commun de l’Afrique orientale et australe (le « COMESA »).

L’Accord sur la ZLECAf prévaudra sur les autres accords régionaux uniquement en cas d’incompatibilité spécifique. Par ailleurs, si des États membres ont atteint entre eux des niveaux d’intégration régionale plus élevés que ceux prévus aux termes de l’Accord sur la ZLECAf, ils peuvent maintenir ces niveaux d’intégration entre eux, conformément à l’objectif général de l’Accord sur la ZLECAf.

Maintenant que l’Accord sur la ZLECAf est en vigueur, les États membres lanceront la phase opérationnelle de l’accord lors du sommet extraordinaire des chefs d’État et de gouvernement, qui se tiendra au Niger le 7 juillet 2019. Au cours de cette phase, les États membres devront éliminer les tarifs douaniers et libéraliser le commerce des services d’ici janvier 2020, entamer la phase II des négociations dans les domaines des droits de propriété intellectuelle, de l’investissement et de la politique sur la concurrence, et établir un mécanisme de règlement des différends. Les protocoles de la phase II comportent leurs propres instruments de ratification, et les négociations devraient être finalisées d’ici juin 2020.

Même si la mise en œuvre de l’Accord sur la ZLECAf devrait améliorer le commerce intra-africain et aider les États membres à rehausser leurs capacités industrielles, il reste encore bien des étapes à franchir. Plus de la moitié des États africains n’ont pas encore ratifié l’Accord sur la ZLECAf et bon nombre de protocoles clés sont toujours en cours de négociation.

Au cours des prochains mois, nous continuerons de suivre l’évolution de l’ambitieux Accord sur la ZLECAf.

Pour en savoir davantage, communiquez avec :

Fabien Lanteri-Massa                514-982-4034

ou un autre membre de notre groupe Afrique.

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